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yo ni furu mo
sara ni Sôgi no
yadori kana
vivre en ce monde
comme dit Sôgi dure aussi longtemps
s’abriter de la pluie
(été 1682)
NB : Furu peut signifier « vieillir » ou « la pluie ». Bashô admirait grandement le poète de renga Sôgi (1421-1502). Son admiration pour Sôgi était si grande que sa strophe est exactement comme celle de Sôgi (« yo ni furu mo / sara ni shigure no / yaadori kana ») excepté pour un mot. Bashô substitua à shigure (« averses hivernales ») le nom de Sôgi.
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un pauvre temple
le gel sur la bouilloire en fer
a une voix froide
(hiver 1682)
NB : On considère que ce verset personnifie le pot de fer, mais si on pense à « voix » le sens change. Sonner une cloche de fer dans le temple pourrait être comme si l’on frappait la bouilloire.
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des couettes si lourdes
on voit surement la neige
dans les contrées lointaines
(hiver, année inconnue)
NB : Bashô étudiait, c’est flagrant, les poètes chinois pendant sa solitude hivernale. Ici son influence semble être celle de Ke Shi : « mon chapeau est lourd de neige / sous les cieux de Wu » Il change le chapeau en couverture. À l’époque, les Japonais dormaient dans desrobes rembourrées, avec des manches, au lieu de sous des couettes ou des couvertures. Go ten renvoie aux cieux du pays de Wu, maintenant Jiang Su Sheng, qui signifie seulement « dans un pays lointain au-delà des montagnes ». La pile de couvertures entassées sur une personne ressemble à la neige sur les lointaines montagnes.
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Jour de l’an
je revois que je suis aussi seul
qu’un jour d’automne
(Nouvel An, 1683)
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La paruline
endort-elle l’esprit
du beau saule ?
(printemps 1683)
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fleurs de ce monde
mon vin est blanc
mon riz est sombre
(printemps 1683)
NB : Le mot ukiyo a de nombreux sens, dont « se réjouir », « être ivre », « enjoué », aussi bien qu’il fait penser au « monde éphémère », ou à ce monde « troublé », « difficile », « ennuyeux », « mélancolique »… Le saké n’est pas filtré et le riz non raffiné. L’idée est que, peu importe que le pique-nique contienne des denrées pauvres, puisque les fleurs sont si belles. Une autre interprétation : même la nourriture de piètre qualité constitue les fleurs de Bashô.
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(à suivre, 164-1012)