P. 64 :
Teitoku Matsunaga (1570-1653) :
Son poème de mort :
Goutte de rosée ma vie
s’évanouit
les vêtements dans le coffre à bijoux
ne pourront plus jamais être portés :
c’est la Loi.
–
Un autre de ses jisei :
Demain sera comme aujourd’hui,
pensons-nous le jour d’avant
Mais aujourd’hui nous réalisons
que tout est changement :
Ainsi va le monde.
–
Retraite hivernale :
même les insectes
respectueusement
–
Meilleures que les fleurs de cerisier
sont les boulettes de pâte –
oies sauvages de retour
A propos de ce haïku, Nobuyuki Yuasa, proposa un commentaire, dans la revue « Blithe Spirit » vol 8, n° 3 (pp. 12-24), sous sa version :
Plus que les fleurs de cerisier
elles semblent aimer les boulettes,
oies sauvage de retour
: « Ce poème représente l’étape où les objets naturels sont employés comme métaphores évidentes des affaires humaines. Dans ce poème, le poète ne s’intéresse pas du tout à la description des oies sauvages retournant chez elles, dans le nord, au printemps, mais il les utilise comme métaphore des hommes qui souhaitent remplir leur estomac avant de régaler leurs yeux avec les fleurs de cerisier. De plus, les oies sauvages retournant chez elles constituent un thème standard du waka traditionnel. Le poète se réjouit donc de jouer le rôle d’un iconoclaste. »
(cité dans A Silver Tapestry , le meilleur des écrits critiques de la BHS, des 25 premières années. Editeur Graham High, The B.H.S., 2015, p. 55)
°
Ses disciples :
Ryûho (mort en 1744).
Il grava son poème de mort sur sa propre tombe et mourut peu après, à 71 ans :
La lune et les fleurs de cerisier –
Maintenant, de ce monde,
je connais le troisième vers
°
Ishû (ou Shigeyori) (mort en 1680, à 74 ans) :
Les bâtons des pèlerins seuls
passent
sur la lande estivale
–
Le pied sait que c’est
le premier matin de l’automne
sur la véranda fraîchement lavée
–
C’est l’équinoxe de printemps
la compassion du Bouddha
nous permet de casser les branches fleuries
°
Teishitsu (mort en 1673, à 64 ans) :
Allons à Saga,
mouettes,
manger de la truite !
°
Bôitsu (1548-1630). Etait aveugle.
Je suis ici au milieu des fleurs !
J’entends les gens rire
dans les montages printanières
–
Attendant le vent depuis si longtemps,
jusqu’à aujourd’hui,
feuilles tombées !
°
Tokugen (mort en 1647, à 89 ans).
Son dernier verset :
Jusqu’à maintenant
je racontais des balivernes –
Une nuit de lune
–
N’importe comment nous la voyons,
il n’y a rien de plus noir
que la neige
: « Voici un exemple de comment le zen intellectuel, et la philosophie de Lao-tseu et de Tchouang-tseu, ne peuvent jamais devenir de la poésie. » (R.H. Blyth.)
°
Kigin. (Professeur de haïku de Bashô ; Prêtre shintô) :
Les herbes de la pampa
prennent la forme
du vent d’automne
–
De l’eau trouble coulant
sous les fleurs de cerisiers
le long de la rivière Yoshino
°
Saimu (mort à 73 ans ; Elève préféré de Teitoku.)
Son jisei :
A l’aube
la cloche résonne dans les fleurs
autour du portail du temple Jôdô
–
Son corps a fini
en vacuité –
Quelle chose est une cigale !
°
Baisei (mort en 1699, à 89 ans. Disciple de Teitoku.) :
Sont-ce des tourniquets,
ces papillons
volant au milieu des vagues de fleurs de cerisier ?
–
Le bateau sous la lune
a besoin d’un bon vent
dans le brouillard matinal
°
Dôsetsu (mort en 1654. Disciple de Teitoku.) :
Si cela existait,
la femme-fantôme-de-neige aussi
serait comme un melon blanc
°
Tadatomo (mort en 1676, à 52 ans. Elève de Herukiyo (mort en 1657.))
Charbon blanc ;
c’était autrefois
une branche enneigée
°
Gensatsu (mort en 1689, à 83 ans. Un des « 5 sages d’Edo ».) :
Un faon *
tétant les seins de sa mère
sous les flèches **
* = un bébé en habits de faon
** = un kimono à motif de flèches.
°
Mitoku (mort en 1669, à 82 ans) :
Ces fleurs enneigées
doivent être une réponse
aux « fleurs-de-neige » *
* : « snow-flowers ».
°
Ryôtoku (un des plus anciens disciples de Teitoku) :
Sur la rive de Sumi-no-e
les tambours des vagues
avec la musique des pins
–
Papillons dansant
parmi les fleurs de cerisier ;
Kagura * sous les Ise-zakura **
* : une sorte de cerisier-saule
** : la danse sacrée du sanctuaire d’Ise.
°
(A suivre :
Sôin et l’école Danrin. (p. 78))