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Bashô ++ : une étude comparative de ‘Bashô Seigneur ermite’ de M. Kemmoku et D. Chipot, éd. La Table ronde…

25 mars 2012

Bashô ++

I)

Le chapitre « Époque de Genroku » (pp. 350-362), de l’anthologie Bashô, Seigneur ermite, de M. Kemmoku et D. Chipot, éd. La Table ronde, 2012, pourrait contenir les haikai suivants (placés dans leur chapitre « Haïkus dont les dates sont inconnues » (pp. 363-373)) :

945) kono tsuchi no // Ce maillet //
947) matoudona // Un chat en chaleur
948) ha ni somuku // Opposées aux feuilles //
949) saki-midasu // En pleine floraison //
950) nara nanae // Sept temples //
951) saigyô no // L’ermitage de Saïgyô //
953) chô tori no // Oiseaux et papillons //
954) yo ni sakaru // Même en pleine floraison de cerisier //
957) matsu-kaze no // Vent dans les pins – //
959) nadeshiko ni // Sur les œillets //
960) waga yado wa // À mon ermitage //
963) hi ni kakaru // Le soleil couvert de nuages, //
964) asana asana // Tous les matins //
965) mono ieba // Quand on dit quelque chose //
967) nani kûte // Que mangent ces pauvres gens //
968) ka o nokosu // L’odeur de fleur d’orchidée //
969) kono tera wa // À ce temple //
970) musashino ya // La plaine Musashinô – //
974) kogarashi ya // Le vent sec et froid d’hiver //
et
975) setsukarete // Supplié //

, qui furent écrits entre 1684 et 1694, si j’en crois Jane Reichhold, d’après son ouvrage : BASHO, The Complete Haiku, Kodansha Int., 2008.

De l’été 1683 date(rai)ent également les :
956) hototogisu // Coucou – //
958) shira-geshi ya // Ces fleurs de pavot //,

du printemps 1684 :
946) nori-jiru no // Dans le bol décoré et laqué //,

de l’automne 1686 :
962) zatô kato // « Est-il aveugle ?» //,

et de l’automne 1688 les :
971) aki o hete // Passant l’automne //
et
972) yuki aki ya // Fin d’automne – //,

également placés dans l’ouvrage de M. Kemmoku et D. Chipot dans le chapitre « Haïkus dont les dates sont inconnues ».

(à suivre :

II)

Versets de Bashô non contenus dans « L’intégrale des haïkus » de Bashô Seigneur ermite, éd. La table ronde, 2012…)

par D.P.

Les 1012 haikai de Bashô : 233-237)

20 février 2012

°
(Composé en voyant un écran de fleurs de pruniers et un corbeau à la maison de Sakuei. On y tint une séance de renga avec ce verset-ci comme hokku (verset de départ).)

un corbeau errant
son vieux nid est devenu
un prunier

(printemps 1685)

NB : La note d’en-tête fut ajoutée par Dohô dans son livre Shô Ô Zen-den. Dans ce poème, Bashô se compare au corbeau peint sur l’écran. Au lieu de séjourner dans la simplicité d’un nid de corbeau, il dort au milieu des fleurs de prunier parce qu’il demeure chez un ami élégant. Les corbeaux ne sont habituellement pas tenus pour des oiseaux migrateurs, mais l’idée d’un corbeau errant signifie un oiseau de passage, ou un prêtre en voyage.

°

le plan
pour Kiso en avril
contempler les fleurs

(printemps 1685)

NB : Kiso était le nom d’une région d’une rivière montagneuses. À cause de l’altitude, les fleurs de cerisiers fleurissaient plus tardivement.

°
(Sur la route de Nara :)

c’est sûrement le printemps
sur les montagnes sans nom
un fine brume

(printemps 1685)

NB : Pour aller de Nagoya à Nara, Bashô devait franchir une chaîne montagneuse. Au printemps, les montagnes du bord de mer amassent de l’humidité et remplissent les vallées d’une brume chaude. Y penser fait surgir de nombreux sentiments d’amour et de nostalgie.

°
(Au deuxième mois, je me retirai dans le Hall de Nigatsudô :)

les moines
tirant de l’eau
du bruit glacé des sabots

ou :

tirant de l’eau
les bruits de sabots
des moines gelés

(hiver 1685)

NB : À Nara, dans le temple Tôdaiji se tenait, généralement pendant les deux premières semaines du deuxième mois du calendrier lunaire, correspondant maintenant au mois de mars, une Cérémonie du Puisage de l’Eau. Quand les moines tournaient autour de l’autel, dans leurs déambulations nocturnes, leurs sabots de cèdre rendaient un bruit comme s’ils marchaient sur une terre gelée. La fin de la cérémonie consistait à tirer de l’eau de la source Akai, maintenant appelée Asakai.

°
(À Take no Uchi dans la province de Kazuraki vivait un homme qui prenait grand soin de sa famille. Au printemps il employait beaucoup de travailleurs aux rizières et à l’automne pour la moisson. Sa maison était remplie du parfum des fleurs de prunier, ce qui encourageait et consolait les poètes affligés.)

printemps précoce
vendant du vin de fleur de prunier
le parfum

(printemps 1685)

NB : Ce bouilleur de saké non désigné organisa une séance de renga. Quand on coupe la racine d’iris sucré en petits morceaux pour adoucir le saké, la boisson est appelée vin de prune. Il y a ici une devinette non-dite : qui vend les prunes, le parfum ou la saison des fleurs de prunier ?
°
(à suivre, 238-1012)

Les 1012 haikai de Bashô – 226)

13 février 2012

°

poésie comique
dans le vent d’hiver j’ai l’air
de Chikusai

(hiver 1684)

NB : Le « kyôku » (« haïkaï comique ») et le « kyôka » (« tanka comique ») sont deux genres différents, mais « kyôka » est le terme le plus ancien, parce que le waka est plus ancien que le haïkaï. On considérait que ces strophes étaient comiques ou folles parce qu’elles se référaient au travail de l’écriture (…). Chikusai était un pauvre médecin-poète qui voyageait en composant des vers drolatiques pour amuser ses patients aux dépens des poètes pompeux.

°

(à suivre : 227-1012)

Les 1012 haikai de Bashô – 210-215)

3 février 2012

°
(Nous allâmes de Yamato à Yamashiro, passant par la route d’Ômi à Mino. Après Imasu puis Yamanaka, je vis la vieille tombe de Tokiwa. Je me demandais ce qu’Arakida Moritake, d’Isa, voulait dire par l’expresssion de son poème « le vent d’automne ressemble au Seigneur Yoshitomo ». Ainsi composai-je :)

le coeur de Yoshitomo
ressemblait peut-être
au vent d’automne

(automne 1684)

NB : Yoshitomo (1096-1156) fut un gouverneur légendaire, cruel et assoiffé de sang, qui tua tous ceux qui se dressaient en travers de son pouvoir.

°
(Sur la tombe de Tomonaga dans la province de Mino)

enseveli dans la mousse
le lierre distrait
une prière bouddhiste

(automne 1684)

NB : Bashô donne une qualité humaine au lierre, le rendant « distrait ». L’idée intéressante est que, bien qu’il voie le lierre comme étant distrait, la juxtaposition des lignes peut donner l’idée que le lierre est une prière inoubliée. Il y a aussi l’idée que la tombe est ensevelie par trois éléments : la mousse, le lierre, et les prières

°
vents d’automne
dans les halliers et les champs
la barrière de Fuwa

ou :

vents d’automne
comme des halliers et des champs
la barrière indestructible

(automne 1684)

NB : Fuwa signifie « indestructible ». La barrière était le poste-frontière du district de Fuwa où l’on identifiait et/ou fouillait les voyageurs.

°

pas encore mort
mais dormant à la fin du voyage
le soir d’automne

(automne 1684)

NB : Quand Bashô entreprit ce voyage, il crut qu’il allait y mourir. Là, à la fin de l’automne, il n’est pas mort, mais ne fait que dormir, au but de son voyage.

°
(Dans l’automne avancé, souhaitant voir les feuilles colorées des cerisiers, je pénétrai dans la montagne de Yoshino, mais, les pieds douloureux à cause de mes sandales de paille, je m’arrêtai pour me reposer et posai ma canne.)

les feuilles se dispersent
lumière du cerisier
sur un chapeau à lattes de cyprès

(automne 1685)

NB : Les voyageurs portaient des chapeaux plats, semblables à des paniers tissés de fines lamelles de cyprès. Le mot anglais « light » (: « léger » ou « lumière ») permet encore plus d’interprétations pour ce poème. Les arbres sont moins denses sans leurs feuilles. Sans feuilles plus de lumière tombe sur le chapeau de soleil de Bashô. Une autre idée est que Bashô trouve les feuilles qui tombent sur son chapeau si charmantes qu’il ne sent pas leur poids. De plus, les feuilles ont entreposé toute la lumière de l’été, et quand elles tombent, la lumière de l’été tombe aussi.

°

comme il est dur
le bruit des grêlons
sur un chapeau de cyprès !

(hiver 1684)

NB : Parce que les lammelles fines du cyprès étaient plus solides que la paille, les voyageurs préféraient ce genre de chapeaux.

°
(à suivre : 216-1012)

Les 1012 haikai de Bashô – 158-163 )

25 décembre 2011

°

yo ni furu mo
sara ni Sôgi no
yadori kana

vivre en ce monde
comme dit Sôgi dure aussi longtemps
s’abriter de la pluie

(été 1682)

NB : Furu peut signifier « vieillir » ou « la pluie ». Bashô admirait grandement le poète de renga Sôgi (1421-1502). Son admiration pour Sôgi était si grande que sa strophe est exactement comme celle de Sôgi (« yo ni furu mo / sara ni shigure no / yaadori kana ») excepté pour un mot. Bashô substitua à shigure (« averses hivernales ») le nom de Sôgi.

°

un pauvre temple
le gel sur la bouilloire en fer
a une voix froide

(hiver 1682)

NB : On considère que ce verset personnifie le pot de fer, mais si on pense à « voix » le sens change. Sonner une cloche de fer dans le temple pourrait être comme si l’on frappait la bouilloire.

°

des couettes si lourdes
on voit surement la neige
dans les contrées lointaines

(hiver, année inconnue)

NB : Bashô étudiait, c’est flagrant, les poètes chinois pendant sa solitude hivernale. Ici son influence semble être celle de Ke Shi : « mon chapeau est lourd de neige / sous les cieux de Wu » Il change le chapeau en couverture. À l’époque, les Japonais dormaient dans desrobes rembourrées, avec des manches, au lieu de sous des couettes ou des couvertures. Go ten renvoie aux cieux du pays de Wu, maintenant Jiang Su Sheng, qui signifie seulement « dans un pays lointain au-delà des montagnes ». La pile de couvertures entassées sur une personne ressemble à la neige sur les lointaines montagnes.

°

Jour de l’an
je revois que je suis aussi seul
qu’un jour d’automne

(Nouvel An, 1683)

°

La paruline
endort-elle l’esprit
du beau saule ?

(printemps 1683)

°

fleurs de ce monde
mon vin est blanc
mon riz est sombre

(printemps 1683)

NB : Le mot ukiyo a de nombreux sens, dont « se réjouir », « être ivre », « enjoué », aussi bien qu’il fait penser au « monde éphémère », ou à ce monde « troublé », « difficile », « ennuyeux », « mélancolique »… Le saké n’est pas filtré et le riz non raffiné. L’idée est que, peu importe que le pique-nique contienne des denrées pauvres, puisque les fleurs sont si belles. Une autre interprétation : même la nourriture de piètre qualité constitue les fleurs de Bashô.

°°°
(à suivre, 164-1012)

Le haïku en noir et blanc (Proposition du 9/8/11)

18 décembre 2011

°
(Proposition du 9/8/11 :)

Du haïku en couleurs
vers un haïku en noir et blanc !

/ Pâlir (Polir) le haïku !

= Décolore ton haïku pour que le lecteur le recolorie !


(Lu le 16/12/11 :)

« Plus tard, Bashô dit : « La Poésie d’autres écoles est comme une peinture en couleurs. Dans mon école, on devrait écrire la Poésie comme si c’était une peinture à l’encre noire. »

(: in Bashô The Complete Haiku, par Jeanne Reichhold, Kodansha Int., 2008, p.256)

°