Archive for décembre 2009

à propos du Bol Vide

31 décembre 2009

extrait d’un mail d’anna, qui dit bien notre philosophie sur notre blog du bol vide :

 » …l’esprit du bol… notre recherche et notre pensée sur le haïku restent essentiellement zen, donc le plus épuré possible, avec des mots simples placés dans une construction majeure … nous sommes fidèles à l’idée que le haïku est un peu comme un trait de pinceau inaltérable projeté avec la force de l’esprit… c’est l’esprit qui donne l’énergie …

…nous y trouvons cette merveilleuse spontanéité …

plus on découvre le haïku, plus on constate qu’on a tout à apprendre … un peu comme un voyage sans but …  »

anna

blog : « Le bol vide »
http://lebolvide.over-blog.com/
lebolvide@gmail.com

Le Grand Simple

31 décembre 2009

°

Le Grand Simple
(Tai su),
autre nom du
Tao (/Dao)

°

d.

sur mon 31

31 décembre 2009

°

dernier jour de l’année
le gris du ciel
sur les toits

°

dernier soir de l’année
la merditude des choses

°

31 décembre
un père emmène son fils retardé
voir
la merditude des choses *

* : film de Felix van Groeningen, Bel.-Pays-Bas, 2008
que je vous incite à voir, pour son humanité, du côté de chez Brel…

°

31 décembre
un sapin déjà
dans le caniveau

°

basculant
d’un an
l’autre

°

passer à l’an neuf
avec un ptit ballon orange
ramassé dans la rue

°

31 décembre,
taillant mes crayons

°

d. (31/12/09)

Haïkus and co. de Py – mars 03

31 décembre 2009

°°

au moment où le nuage (u.s.)
enflamme l’océan :
des rires

°

BIG surely
But BROTHER :
How ?

un ruban rouge
frissonne
autour d’un carré de mystère

pleine lune
d’avant-printemps
trois va-t-en-guerre

the three
war heads of states :
a bad senryu

les trois
chefs de guerre d’états :
un mauvais senryû

ô pleine lune
et la folie meurtrière
des hommes !

Ainsi trempons-nous tous dans ce bain d’horreur

ils cherchent des complices,
les futurs assassins

nouveaux crimes
savamment orchestrés :
ils veulent des hourras !

paroliers
d’un monde de mort :
la paix, suprême offense

équinoxe de printemps –
la chute de la raison

spring equinox
the fall of
reason

l’arraison de la raison …

Nous refusons à la raison le droit d’abdiquer.

équinoxe vernal –
l’équilibre de la cruauté

le printemps
malade de la paix
(cf La Fontaine)

Nos demi-dieux de la guerre
ont soif
d’un sang bien noir

le bouclier de la lune
contre la folie
des hommes ?

trois pantins obtus
portant le chapeau
du crime organisé

les flics de la planète
s’embourbent
dans le désert

généreux déjeuners (onéreux) de généraux dégénérant…

les augures
favorables à la guerre
en mars

une foi,
une loi :
leur guerre

G.W.Butcher

G.W.Boucher

Bush à miel (noir)

mauvais goût :
ils rejouent
au golfe

« carpet bombing »
red, I presume

« tapis de bombes »
rouge, je suppose

surgical strike
collateral damage
God with us
etc.

frappes chirurgicales
dommages collatéraux,
Dieu avec nous,
etc.

« Pour relancer l’économie, rien de tel qu’une bonne guerre
rapide et victorieuse. »

8 heures 30
il s’installe au café
pour prendre des nouvelles
de la guerre

premier jour de guerre –
beau mais encore frais

bérets rouges treillis verts
les soldats tchadiens en bouquet
dans leurs véhicules

veille du printemps
le premier jour
de leur deuxième guerre

premier matin de guerre –
au bureau de la poste
presque personne

premier jour de guerre
un pigeon à petits pas
picore la pelouse

« We want an end to your sufferings »
says he
before even hitting them

« Nous voulons mettre fin à vos souffrances »
dit-il
avant (même) de les frapper



Bush à la télé :
cravate rouge
costume bleu-pétrole

une femme
avec un sac
VICTOIRE hommes
– premier jour de guerre

cut daffodils
on my street corner –
« Cutting Daisies »
in Irak

jonquilles coupées
au coin de ma rue
« Cutting Daisies » *
en Irak

« Marguerites coupantes »

cutting deathies…

Irak, Tchetchenia, Tibet, …
choose your favorite war

Iraq, Tchétchénie, Tibet,…
choisissez votre guerre

between Bush
and Sharon :
roses

entre Bush *
et Sharon :
des roses

* = Buisson

Has one ever founded
a ministry of Attack ?

A-t-on jamais fondé
un ministère de l’Attaque ?

« Welcome in Iraq » :
a sign put up
by invading (UK) troops

« Bienvenue en Irak » :
un panneau dressé
par les troupes d’invasion (britanniques)

Où en est le cours du sang
sur les marchés financiers ?

Plus vous écrasez les hommes,
plus vous parlez de dieu(x).

Sur une chaîne les plus belles filles
Sur une autre, les plus grandes horreurs

(B)US(H) showing the way :
Turkish troops
Invade Kurdistan.

(B)US(H) montrant la voie :
les troupes turques
envahissent le Kurdistan.

silence assourdissant
des images
Bagdad la nuit

Iraqi people
Ground heroes

Bagdad bombings –
The couple next door
Still fighting

Bombardement de Bagdad –
le couple à côté
se bagarre encore

A shower of bombs
from the desert

Une douche de bombes
du désert

déluge de feu
pluie du désert

trente pour cent
des soldats américains
tués par leurs « propres » tirs *

• : « friendly fires » * = « tirs amicaux »

Bringing
Humanitarian Forces
Into Irak

Apportant leurs
Troupes Humanitaires
En Iraq

Poor Americans :
their Humanitarian help
delayed

Pauvres Américains :
leur Aide Humanitaire
retardée

oil well –
all is not
so well ?

puits de pétrole
tout ne baigne pas ?

deuxième jeudi de guerre
même pelouse
même soleil,
même pigeon ?

bla bla bla bla
« un monde paisible »
bêêê bêêê bêêê
bla bla bla
« l’aide humanitaire »
bêêê bêêê bêêê

bêêê bêêê bêêê
Peace
Blah blah blah
Humanitarian relief
Bêêê bêêê bêêê
Blah blah blah

Achieving Peace
through
Death

Obtenant la Paix
de
la Mort

between
bombs
birds

entre
les bombes
les oiseaux

avant la liberté
la mort

who’s mass destructing
nowadays ?

Qui
détruit massivement ?

their bombs
and their god(s)
with them to crucify
the rest
of Mankind ? *

* orig. : « Humanity ».

leurs bombes
et leur(s) dieu(x)
avec eux
pour crucifier
le reste
de l’humanité ?

(one word –ku :)

G (L) ORY

Ku en un mot :

G (L) O (I) RE

ton souffle
au long du lit
matin calme

ramenant
les pans de sa veste
sur son T-shirt
( voyage en bus )

sous le cuir noir :
boules luisantes

chemin et rivière
(s’en) vont devisant
-un pin pour parasol

( : concours haïku-photo, mars, sur Mots Magiques)

printemps tout proche
les températures remontent
les jupes aussi

son corsage
éclate au soleil
des oiseaux sifflent

mes yeux entre ses jambes
qui monte(nt) l’escalier
– soleil

aux terrasses
fleurissent les client(e)s
– Aisez-vous !

terrassis
je contemple
les passantes
girondes
elles virent…

femme dont les seins
émeuvent le corsage –
– dernier jeudi de mars

elle lapsuça

sending kisses
to the girls on the screen
– emptiness ?

soufflant des baisers
aux filles sur l’écran –
– vacance ?

sur mes cuisses
les tiennes –
traversée nocturne

on my thighs
yours
– a night journey

sur la rambarde
un pétale vient se poser
tirelis d’oiseau

°°

d. (mars 2003)

Haïkus and co. de Py – février 03

31 décembre 2009

°°

belle infirmière
un dimanche matin
tirant une sonnette

sexy nurse
on a Sunday morning
ringing a bell

°

guerre en Irak –
partout en blanc
dans cette station
le mot « amour »

less reason
more passion
– a war on

moins de raison
plus de passion
– une guerre

warming up
people’s blood
to war temperature

réchauffant
le sang des gens
jusqu’à température guerrière

war happy leaders –
their dream
our nightmare

chefs joyeux de guerre
leur rêve –
notre cauchemar

(obus)

à côté de mon père
son ami
dont le crâne
s’ouvre en deux

(« Shock and awe » :)

Armageddon –
they wish sheer hell
on their supposed enemy

Apocalypse –
Ils souhaitent l’enfer pur
à leur supposé ennemi

qui peut les faire rire
pour qu’ils en meurent ?

who could make them laugh
so they could kill themselves ?

Quand se tueront-ils
de rire ?

When will they
kill themselves
laughing ?

Rire
les ferait
mourir !

l’horrible aura
de ces chefs
on ne peut plus sanguinaires !

par pitié, faites-les rire !

full moon soon
and soon full blood
running in the East

bientôt la pleine lune
et le plein sang
qui coulera à l’est

one heart
against war
but what about the head ?

prix du pétrole
à la hausse
à la baisse
– grande marée

madness of one
woe of many

folie d’un seul
malheur pour beaucoup

Bush’s cock
Squirting petrol

du sexe de Bush
jaillit le pétrole

petrol brain
petrol cock :
well oiled world

cerveau de pétrole
couilles de pétrole :
un monde bien huilé

Bush showing Jesus
what he should have looked for
in the desert :
petro-dollars.

Bush
montrant à Jésus
ce qu’il aurait dû venir chercher dans le désert :
des pétro-dollars

Bloodoiled Bush

Bush huilé de sang

Happy ending :
the world’s petrol
flowing through Bushes’ pipe

une fin heureuse :
le pétrole mondial
coulant du tuyau de Bush

in the desert
Jesus praying
Bush preying

dans le désert
Jésus priant
Bush pillant

em – Bush – cade

Bush dégout

Bush, Lord of the Rigs

Bush, Seigneur des Tonneaux

Bush in church :
Praying the
Lord of the rigs ?

Bush à l’église :
priant le Seigneur
des Tonneaux ?

preventive prayers :
asking forgiveness
for oncoming crimes

for forthcoming slaughter

prières préventives :
demandant pardon
pour les crimes / le massacre
à venir

Bush in church :
Pray, Lord of the rigs,
forgive us
preventively !

Bush à l’église :
Seigneur des Tonneaux,
Pardonnez-nous
préventivement !

Mars :
Le dieu
au rendez-vous

March –
Mars
marching

Mars –
Mars
en marche

stuck on their mad-wagon :
one way to war
and no brakes

coincés dans leur wagon de fous :
sens unique vers la guerre
– sans freins

USA über alles

°

rumeurs du matin –
l’ombre de la fumée
sur une façade blanche

death
for her seventeenth birthday :
israeli girl shot

la mort
pour dix-septième anniversaire :
jeune israélienne abattue

premiers bourgeons
délicatement elle ouvre
son chemisier

elle s’en vient nue :
ses boules,
sa noire flamme frisée

tous les lundis
je tourne à l’angle du magasin
où les mannequins
pointent du sein

une ceinture d’imperméable
interroge
le trottoir

eau à mi-mollets
il téléphone de la cabine :
inondations à Djakarta

easy ink
flowing from
a favorite pen

l’encre qui coule
si facile
d’un stylo préféré

Saint-Valentin –
remarquant les couples qui s’embrassent
dans le métro

tes seins valant un
… bécot

ciel mon logi – !

cliquetis furieux
d’aiguilles à tricoter
– train de banlieue

le soleil remonte
et redescend
sur sa cuisse nue

– voyage en train

°°

d. (février 03)

Haïkus and co. de Py – janvier 03

31 décembre 2009

°°

nouvel an
un vent nouveau
s’invite en ville

premier janvier
un fond de vin dans la bouteille

refilling
the lonely glass
1st of the year

remplissant le verre
– solitaire
: 1er janvier

dans la vitrine
elle habille le mannequin
et la coiffe
– 2 janvier

de la vitrine
elle retire les lettrines
yeuses fêtes
2 janvier

passant,
la lumière assise
sur les sièges de la gare

vrilles de la vigne vierge
calligraphies du peintre

ô j’aime quand c’est lumineux comme ça
dit-elle en retirant son T-shirt

une araignée
dans la baignoire-sabot
dévisse

rapetissant leurs pas
marchant sur les œufs
de la neige glacée

entre branche et tronc
au nord de l’arbre
une barbe de neige

en haut des vignes
peignées de neige
le village
au bleu céruse

(kyôku ? :)

the newness of sceneries = renewed ink
nouveauté des décors = l’encre se renouvelle

sur mes fleurs artificielles
la neige
persistante

snow
clinging
to plastic flowers

glisser
sur une pisse de chien –
janvier gelé

pendant le chi-kong
elle rajuste ses seins –
jeune femme au chômage

°

phares par deux
dans le paysage blanc
– lent matin

bruit d’une pierre
bruit d’une toux
compartiment fumeur

un cheval debout
entre blanc et vert
broute dans le matin

dans le pré gelé
les vaches
broutent le blanc

une meule noircie
penche sous la neige

°

pudique
elle détourne la tête :
paiement par carte bancaire

l’échéance
du passage outre-vie
s’approche –
ta valise est-elle prête ?

suivre
le vol des mains
de la professeure de tai-ji

oiseau noir
dans le soleil levant –
l’ascenseur sent le café

dehors la neige plane
dedans, ses seins noirs

Tes globes éclairent ma nuit –

à l’approche du contrôleur
têtes et corps
s’agitent

°

Étant donné que la principale nappe de fioul échappé du pétrolier est évaluée à 3500 tonnes, et qu’elle se répartit en boulettes d’une cinquantaine de centimètres, combien faudra-t-il de temps pour faire disparaître les traces de cette catastrophe ?

quatre bateaux ont pu pomper
une soixantaine de tonnes en quarante-huit heures
( : à ce train-là, cent-dix-sept jours, rien que pour cette nappe !)

une nappe,
des galettes de fioul
– la chandeleur

marcher
sur le sable fin
pieds nus :
rêvons !

d’après mes calculs :
encore six-cent-cinquante jours de fuites
du « Prestige ».

inexorables
les boules
reviennent jouer
sur la plage

Sisyphe sans cesse
Ramassant ses galets :
Terre et pétrole

la mer roule
déroule à l’envi
ses galettes de fioul

la mer
joue sur la plage :
boules de fioul

°

au pied de l’épouvantail
une poussée d’orties

gueule cassée
l’épouvantail
porte sa croix

soucoupe verte
le galure de l’épouvantail
atterri dans le chaume

°

ce matin les oiseaux
se lancent des fusées sonores

le chien aboie
son maître aussi –
samedi café noir

°

veste de cuir qui s’ouvre
sur des seins de rêve
– Fashion TV

instants-senryû :
les coups au cœur des modèles
sur Fashion TV

s’il vibre,
le tissu sur tes seins :
colombes

°

Le rêve américain
ne tourne-t-il pas
au Bushemar ?

que la Busherie cesse,
que les Sharognards disparaissent !

Il faut que le monde
(se) retourne sur lui-même
et casse le profit.

« La Liberté »
d’Antoine Bourdelle :
un tronc sans tête,
sans mains…
entouré de musique

( : théâtre des Champs-Élysées)

Lu Yu (1125-1210) :
« Je laisse aller mon pinceau,
tout seul il compose un poème. »

un pigeon boit
d’un filet de pisse
: trottoir

°

blood
sucking
oil

richer oil
if
red(dened) ?

Washington explique aux Occidentaux :
« La guerre c’est bon pour l’économie. »

°°

d. (janvier 2003)

Poèmes de mort japonais – Y. Hoffmann, Ed. Tuttle – R –

30 décembre 2009

°

de RAIZAN

mort le 3 du 10° mois de 1716, à 63 ans :

Suwa saraba mizu yori mizu e yuki no michi

Adieu, père – / comme la neige : de l’eau venue / à l’eau s’en allant

Note de Y. Hofmann : « Contemporain de Bashô, Raizan apprit à écrire des haïkus dès l’âge de huit ans, et fut autorisé à enseigner et à critiquer le haïku à 18 ans. (…) Juste avant de mourir, Raizan écrivit un jisei humoristique sous forme de tanka :

Raizan wa / umareta toga de / shinuru nari / sore de urani mo / nanimo kamo nashi

Raizan est mort / pour payer de l’erreur / d’être né : / De ceci il ne blâme personne / et ne porte aucun grief.

°

de RANGAI,

mort le 26 du 3° mois de 1845, à 75 ans :

Fuji-no-yama / minagara shitaki / tonshi kana

Je désire mourir soudainement / les yeux fixés / sur le Mont Fuji

°
de RANSETSU

mort le 13 du 10° mois de 1713, à 54 ans :

Hito-ha chiru totsu hito-ha chiru kaze no ue

Une feuille se détache puis une autre prend le vent

Note de Y.H. : Ransetsu était un disciple de Bashô qui louait sa poésie (…) Une autre traduction en est possible :

Une feuille tombe, ho !
une autre feuille tombe
haut dans le vent

°
de REKISEN,

mort après 1834, à plus de 86 ans :

Saku mo yoshi chiru mo Yoshino no yamazakura

Laissez-les fleurir ou
laissez-les mourir – c’est même chose :
Cerisiers du mont Yoshino

Note :  » Le mont Yoshino, près de la ville de Nara, est réputé pour sa beauté lors de la floraison des cerisiers « .

°
de RENSEKI,

mort le 5 du 7° mois de 1789, à 88 ans :

Harai arai kokoro no tsuki no kagami kana

J’ai nettoyé le miroir
de mon coeur – maintenant il reflète
la lune

« La lune symbolise le salut dans l’autre monde – ou « sur l’autre rive » –
au-delà des souffrances de cette existence présente ». Elle peut symboliser également (la
lumière de) l’enseignement du Bouddha.

°
de RETSUZAN,

mort le 25 du 8° mois de 1826 à 37 ans :

Tsuyu no yo to satoru sono yo o nezame kana

La nuit où je compris
que ceci est un monde de rosée
je m’éveillai de mon sommeil

°
de RIEI,

mort le 14 du 8° mois de1794, à 22 ans :

Uragarete kaeru ya matsu ni hannyagoe

Tout gèle de nouveau –
parmi les pins, des vents murmurent
une prière

°
de ROBUN,

mort vers 1725 :

Ukine suru tori ya shôji no sakaigawa

Un oiseau aquatique, endormi,
flotte sur la rivière
entre la vie et la mort

°
de ROSEN,

mort le 23 du 8° mois de 1743, à 83 ans :

Hito-taki no hai hakinagase aki no mizu

Balaye
le tas de cendres
dans les eaux de l’automne

°
de ROSHU,

mort le 18 mai 1899, à 74 ans :

Tabidachi ya tôshi to kiite koromogae

Temps de s’en aller…
On dit que le voyage est long :
changement d’habits.

°
de RYOKAN,

mort le 6 du 1° mois de 1831, à 74 ans :

Ura o mise omote o misete chiru momiji

Révélant son envers
puis son endroit, ainsi tombe
une feuille d’automne

N. du trad. (d.p.) :
Ainsi traduit dans  » La Rosée d’un lotus  » (Ryôkan et Teishin) , Gallimard 2002, isbn 2-07-076560-1; p.169 :

Montrant son envers
aussi bien que son endroit
la feuille qui tombe

Note de Yoël Hoffmann : « Son poème de mort a peut-être été composé par un autre poète; Il fut dit par Ryôkan à Teishin (ni), en ses derniers instants. »

°
de RYOSA,

mort le 11 du 7° mois de 1807, à 84 ans :

Sarishi hito wa kyô o kagiri no asagao ka

L’homme est-il
un liseron, qui passe
en un jour ?

°
de RYOTO,

mort le 28 du 4° mois de 1717, à 59 ans :

Gatten ja sono akastuki no hototogisu

Je comprends :
un coucou chante
aujourd’hui à l’aube.

Ryoto fut prêtre shinto et disciple de Bashô.
De lui ce tanka, écrit lors de sa maladie terminale :

Ima made wa hito ga shinuru to omoishi ni
waga mi no ue ni kaku no shiawase

Jusqu’ici
je croyais que seuls
les autres mouraient –
qu’un tel bonheur
dût m’échoir !

°
de RYOU,

mort le 5 du 11° mois de 1794 :

Akatsuki no nami ni wakaruru chidori kana

Un pluvier s’élève
des vagues
à l’aube

°
de RYUSAI,

mort le 11 novembre 1895, à 65 ans :

Karetogete michi no akaruki obana kana

Fragiles herbes de la pampa –
La route
est lumineuse.

°
de RYUSHI,

mort le 6 du 9° mois de1764, à 70 ans :

Mi wa hotoke ware to iu hi wa kurenikeri

L’Homme est Bouddha –
le jour et moi
nous assombrissons ensemble

°

Poèmes de mort japonais – Y. Hoffmann; Ed. Tuttle – O –

30 décembre 2009

°

de OKANO KIN’EMON KANEHIDE

(un des fameux 47 samouraï)
mort le 4 du 2° mois de 1703, à 24 ans :

Sono nioi / yuki no ashita no / noume kana

Sur les champs de neige
de la nuit dernière
le parfum des pruniers

°

d’ONITSURA

mort le 2° jour du 8° mois de 1738 à 78 ans :

Yume kaese karasu no samasu kiri no tsuki

Rends-moi mon rève, corbeau !
la lune à laquelle tu m’éveillas
est toute embrumée !

Commentaire (de Y. Hoffmann) :  » « kiri » (brume) est une image de l’automne, dans le haïku.. Quel était le rêve interrompu par le cri du corbeau ? Le poète eut-il la vision de la pleine lune flottant dans un ciel clair ?  »

Note :
Uejima Onitsura (1661-1738) fut considéré par certains comme l’un des quatre plus grands haïjins. Ce fut également un théoricien hors pair, dans la droite ligne de Bashô.

À la question  » Qu’est-ce que le haïkaï ?  » Onitsura répondit :
 » Dans le jardin, vois, près de nous, le camélia fleurit blanc.  »

Il dit aussi :  » Il n’y a pas de haïkaï sans « makoto » (= vérité, sincérité, absence de « fausseté », « Voie du Ciel »). Aspirer au « makoto » est la voie des Humains. »

Autres haïkaï d’Onitsura :

Bien que je dise :
 » Venez ici, venez ici !  » les lucioles
continuent de s’éloigner

S’élevant seul
contre le ciel d’automne
Le Mont Fuji

Rêves errants, hélas !
Sur les champs tout brûlés
les vents passent en murmurant

°

d’OTSUCHI

mort le 29 du 10° mois de 1872, à 64 ans :

Shiragiku ya hito no sakari mo hodo ga aru

O chrysanthème blanc,
l’homme lui aussi
a passé sa jeunesse!

Com. de Y.H. :  » Otsuchi mourut quand les fleurs de chrysanthème succombent au givre de la fin de l’automne.  »

°

d’OTSUIN,

mort le 25 du 4° mois de 1807 :

Kusa no ne ni kakurete kikan kankodori

Caché dans des racines d’herbes
j’entends un coucou

Note de Y.H. :  » Otsuin mourut au début de juin, quand les coucous migrent de l’Asie du
> Sud vers le Japon, les voix desquels remplissent l’air et évoquent la nostalgie pour ceux
> qui les entendent (…) »

°

d’OZUI,

mort le 10 du 1° mois de 1783, à 52 ans :

Yo no hazuna hiekiru ware mo katachi nashi

Toujours lié au monde,
je me refroidis
et perds ma forme

Blyth HAIKU vol 1, sect 5, 3. La langue japonaise

30 décembre 2009

°
(p.317-20 :)

Le chinois, c’est-à-dire l’ancien chinois, était le langage idéal du Zen, clair et bref, vraiment monosyllabique (le chinois moderne est disyllabique), et pour l’exprimer d’une manière plutôt irlandaise, il est entièrement non-ambigu quand vous en connaissez le sens. Par exemple :

Entrant dans la forêt, il ne dérange pas un brin d’herbe ;
entrant dans l’eau, il ne cause aucune ride.

Ceci décrit l’activité sans ego du poète ou du sage dans son rapport à la nature. Il y a dix syllabes, dix mots en tout, trois fois moins que dans la traduction. Littéralement on a :

Entrer forêt herbe non bouger;
entrer eau non naître ride.

Un autre, également du Zenrinkushû :

Le prunier dépérissant (de vieillesse) contient moins de printemps;
mais le jardin est plus grand, et contient plus de lune.

Le génie du langage japonais (c’est-à-dire jusqu’à récemment) était assez différent de celui du chinois. Non seulement on n’en distinguait, jusqu’à un certain point, pas le sujet, le prédicat et l’objet, non seulement la ponctuation en était pratiquement absente, mais les bords des mots même sont flous. Nous pouvons comparer l’anglais, le chinois et le japonais dans les traductions de la bible. L’anglais et le chinois correspondent par leur précision et leur majesté; par comparaison le japonais semble faible et insignifiant. Mais en fait cette imprécision du japonais correspond à quelque chose dans la vie dont la pensée hébraïque, c’est à dire le langage hébreu, l’anglais et le chinois manquent. Dans la vie il n’y a pas de sujet et de prédicat, de cause et d’effet fixes; pas d’important et de non-important, que nous nous illusionnons à supposer, et qui est implicite dans ces langues. Les choses ne commencent pas avec une majuscule ni ne finissent avec un point; il y a simplement un devenir incessant. La langue anglaise ne reconnaît pas cela; d’où la difficulté majeure du traducteur.
Comme exemple de poésie japonaise en prose, prenons ceci, tiré des Collected Works of Kashino, de Nakajima Hirotari, décédé en 1864 :

Ici et là les feuilles des arbres sont profondément teintées de jaune et de cramoisi, les herbes de la pampa bougent comme si elles saluaient quelqu’un, avec de longues manches – dans tel chemin montagneux de beauté, du milieu s’estompant peu à peu de la fleur (« maiden-flower ») et de l’orchidée, les chrysanthèmes commençant à fleurir, leurs branches courbées par la rosée oscillant, et par-dessus tout nous touchant par leur grâce et leur charme.

Ceci est beaucoup plus vague, ombreux, et coulant loin du lecteur dans l’original que dans la traduction; c’est aussi plus difficile. La beauté du style de l’original a quelque chose de la poésie de Ruskin à son meilleur, quand il décrit la nature; par exemple dans Modern Painters, quand il parle du lever de soleil sur les Alpes, comment les brumes

 » flottent dans des baies étales et des courants qui tournent autour des sommets isolés des collines les plus basses, encore non touchés par cette aube plus froide et calme qu’une mer sans vent sous la lune de minuit; regardent quand le premier rayon de soleil est envoyé sur les canaux argentés, comment l’écume de leur surface ondulante se sépare et disparaît, et en-dessous de leurs profondeurs gisent la cité brillante et les pâtures vertes, telle Atlante, entre les sillons blancs de rivières qui serpentent; les flocons de lumière tombant à chaque instant plus vite et plus larges parmi les spirales étoilées, tandis que les couronnées se rompent et disparaissent au-dessus et que les crêtes confuses et les bords des collines sombres raccourcissent leurs ombres grises sur la plaine.  »

Le haïku est resté remarquablement libre en ce qui concerne le langage; des expressions colloquiales, dialectiques, littéraires ou chinoises ayant été employées szpuis les temps reculés, et de manière croissante. En voici quelques exemples :

beta beta to mono ni tsukitaru haru no yuki

elle colle comme du beurre
sur toutes choses,
cette neige de printemps

Issa.

La nature suintante de la neige de printemps ressort par l’expression colloquiale beta-beta.

kiri-no-ki ya tekipaki chitte tsun to tatsu

Le paulownia
rapidement dépouillé de ses feuilles
bien net

Issa.

tekipaki est une expression colloquiale qui exprime la rapidité de la chute des feuilles du paulownia; tsun to, souvent traduit par « net »suggère l’aspect particulièrement formel de l’arbre.

haru no kaze yanagi ga nakuba fuku maizo

Si les saules n’ont pas de feuilles,
ne soufflez pas,
vents du printemps !

Johaku.

nakuba est une forme littéraire de nakattara :  » S’il n’y avait pas « .

shôjô to ishi ni hi no iru kareno kana

Désolément
le soleil se couche dans les rochers
sur la lande desséchée

Buson.

shôjô, solitaire, seul, est un mot chinois composé souvent utilisé dans lesshi, les poèmes chinois.

4) Les onomatopées (p.321-8).

Haïkus and co. de Py – décembre 02

30 décembre 2009

°°

lancinant réveil
oublié par les voisins –
tout le week-end

dessiner à la main
les contours de la lune
– chi-kong

she cuts slices of lime
– her small breasts

elle coupe
des rondelles de citron vert
– ses seins menus

mouvements réguliers de chi-kong –
même le parquet
travaille

rue du Double Sens

dans mon lit m’accueille
une lune à demi couchée
– tirons le rideau !

une allumette cra-
chant son phosphore

les poulets
à la broche du rôtisseur
réchauffent la rue

°

ton doigt
sur ma joue
– quelle allumette ?

pris
dans les glaces
de ton incendie

ton doigt sur ma joue
-premier barreau de quelle prison ?

le ski de ton doigt
la pente de ma joue
mi-décembre

arc tendu
vers toi
de l’autre côté de l’année

°

une Barbie nue
sèche
sur le rebord de la fenêtre

(kyôku :)

décolore
pour que le lecteur
recolorie

fin de l’année
balayant les mouches
du balcon

°°

d. (12/02)