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Notes de lectures sur « kyôku », « kyôka », « kyôbun »

28 octobre 2013

Recensions à propos de « Kyôku, Kyôka, Kyôbun »,
à travers les ouvrages suivants :

La Littérature Japonaise, par R. Bersihand, PUF, 1957, p.62.
Un haïku satirique, le senryû, par J.Cholley, POF, 1981, p.15, 46, etc.
– Pour avoir des renseignements sur tous ces genres (« secondaires » au haïku), on pourra consulter l’Histoire de la littérature japonaise T.2, par Schuichi Kato, Fayard, 1986, p. 246-259.
Le Char des poèmes Kyôka de la rivière Isuzu de Hokusai, In Medias Res, 2000
Writing and Enjoying Haiku, by Jane Reichhold, Kodansha Int., 2002
L’Anthologie poétique en Chine et au Japon , revue Extrême-Orient – Extrême-Occident, n°25, p.139-163 : « Les recueils comiques de kyôka » par Daniel Struve,PUV Saint-Denis, 2003.

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– In La Littérature Japonaise, par R. Bersihand, PUF 1957,
p.62, on peut lire :

« On doit signaler encore deux genres secondaires : le « kyôka » (« poésie folle »), une sorte de « tanka » comique, et le kyôku (« vers fous »), ou « senryû », un « haïkaï » humoristique. (…) Ce sont souvent des parodies de poèmes réputés. Le « kyôka » existait dès le XII° siècle; il se développa au XVI° siècle, et fleurit dans la période Tokugawa. Le « kyôku » apparut à cette même époque. Tous les deux connurent la plus grande faveur au XVIII° siècle.
Enfin, de même que le « haïbun » correspond au « haïkaï », de même au « kyôka » correspond le « kyôbun » ou « ‘composition folle ». Ce dernier est pratiqué par les poètes de « kyôka » et par les auteurs de romans comiques, tel Samba. »

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Le dernier paragraphe de l’Histoire de la Littérature japonaise par Schuichi Kato, Tome 2, Éd Fayard / Intertextes, 1986, isbn 2-213-01709-3, s’intitule :  » la littérature du rire « . Il couvre les pages 246 à 259.

En voici quelques extraits :

 » La tragédie des pièces où il était question de double suicide fut compensée par l’humour des vers comiques (kyôku et kyôka) et par des histoires drolatiques (kobanashi).  » (p.246).

 » Nous trouvons 3 formes principales de littérature humoristique dans la 2° moitié du XVIII° siècle; aucune n’était nouvelle. Les origines du « kyôku » (sorte de « haïku » humoristique) remontent à l' »Inu tsukubashû » et celle du kyôka (« poésie folle », forme humoristique de « tanka ») aux poèmes drolatiques dits « odoke uta » de l’époque de Heian.
Quant aux histoires dites « kobanashi » …, les « chônin » et les samouraïs qui écrivaient des vers humoristiques se prévalurent de ces formes établies, en amplifièrent les thèmes et en modifièrent, dans une certaine mesure, le caractère de l’humour pour en faire une forme culturelle qui convienne à l’époque et qui en soit caractéristique.  » (p.248).

 » Karai Senryû (1718-1790), chônin d’Edo, publia en 1765 la première partie du recueil de « kyôku » intitulé Haifû yanagidaru ;
Kimura Bôun, samouraï de rang inférieur et poète de « kyôka » ( 1719-1783) réunit une anthologie de kobanashi qui fut publiée en 1773 (…) et
Yomo no Akara (1749-1823) compila en 1783 une des premières anthologies de « kyôka », le Bansai kyôkashû (Recueil d’une kyrielle de kyôka)…
Senryû réunit encore 23 compilations vers la fin de sa vie ; et que 167 autres recueils aient été créés témoigne de la popularité de cette forme. On donna à ce genre de vers le nom du poète, et désormais on connaît les kyôku sous la désignation de senryû.(…). Les thèmes, pour la plupart, sont ceux de la vie quotidienne d’Edo, mais on y trouve également des vers au sujet des personnages célèbres du No, du kabuki et de classiques populaires, comme le Taikekiki et l’Ise monogatari.
Les thèmes de la vie bourgeoise sont multiples, y compris les rapports familiaux (entre mari et femme, parents et enfants, épouse et belle-mère), coiffeurs, menuisiers, moines itinérants, nourrices, servantes, réunions bouddhiques pour prière en commun, pièces de théâtre, aliments et boissons.  » (p.248/9)

 » Voici un vers bien connu au sujet d’une union qui laisse à désirer :

Tana naka de / Shiranu wa teishu / Hitori nari
Dans le quartier, / un seul l’ignore – / le mari

Mais la vaste majorité des senryû traite des rapports sexuels. Dans beaucoup d’entre eux l’action se déroule dans le Yoshiwara (= quartier des plaisirs d’Edo) ; certains autres traitent du double suicide. D’autres encore concernent les femmes de la cour shôgunale, leurs aphrodisiaques, godemichés et appareils anticonceptionnels. Il ne s’agit presque jamais de la vie paysanne ou du paysage des provinces… Le chônin d’Edo, tel que les senryû le révèlent, se suffit à lui-même, est oublieux du monde à venir et fort peu conscient de celui en dehors de la ville.  » (pp.249/50)

 » Pourtant on se moque également des samouraïs…
On trouve également des satires au sujet de moines et de médecins :

Isha shû wa Jisei wo homete Tataretari

Ayant loué le dernier poème° du défunt, le médecin s’en va.

° = Jisei = poème de mort (cf aussi : Japanese Death Poems, le livre de Yoël Hoffmann paru aux éd. Tuttle, 1986, isbn 0-8048-3179-3, et en grande partie traduit par votre serviteur : cf http://.haicourtoujours.wordpress.com ).

 » Il est évident que les senryû et les kobanashi ont des similitudes de thèmes et d’humour. On trouve jeux de mots, plaisanteries sur le quotidien, et légers malentendus psychologiques, railleries peu sévères, anachronismes délibérés; et, à l’occasion, on se moque des conventions sexuelles… (p.252)

 » Les kyôka étaient quelque peu différents de ces formes. L’époque la plus connue pour ces versions comiques de tanka est sans doute celle de Temmei (1781-1788), pendant laquelle elles jouirent d’une grande popularité parmi les intellectuels guerriers et certains chônin littéraires. À la différence des senryû, les kyôka étaient attribués à des poètes spécifiques lorsqu’ils furent réunis dans des recueils (…) Les noms des poètes les plus célèbres de l’époque se trouvent dans le recueil Azuma-buri kyôka bunko (Recueil de poèmes comiques à la manière d’Azuma), publié par Yadoya no Meshinori, agrémenté de portraits par Kitao Masanobu et de calligraphies du pinceau de Yomo no Akara. On y trouve le portrait de 50 poètes accompagné d’un kyôka de chacun.  » : pp. 252/3.

(C’est le principe exact du livre Le Char des poèmes Kyôka de la rivière Isuzu, illustré par Hokusaï ; éd. In Medias Res, 2000; isbn 2-9511719-1-9 = un kyôka et le portrait de son auteur.)

 » La moitié étaient des samouraï, l’autre moitié des chônin. (…) Des kyôka furent aussi écrits par des savants (…), par des peintres de l’école Kanô, par des acteurs (…) et par des courtisanes.  » : pp.253/4

 » Il fallait, pour écrire des kyôka, une certaine instruction littéraire, ce qui imposait des limites à leur popularité parmi les chônin. (…) La forme préférée du kyôka était la parodie de tankas célèbres  » : p.254.

 » Nous avons déjà dit que les kyôka pouvaient comporter la critique politique et la satire sociale, mais à quelques rares exceptions près, la poésie lyrique japonaise avait évité le commentaire politique et social et les kyôka, en général, se conformèrent à la tradition. Le domaine de la poésie comique, comme celui du waka, était celui de tous les jours, s’intéressant surtout au monde d’ici-bas, dominé par les valeurs ordinaires et hédonistes. Et là, les kyôka n’étaient pas différents des senryû. Les soucis principaux des poètes de kyôka étaient l’amour, le vin et l’argent. (…)

Yo no naka wa
Itsu mo tsuki yo ni
Kome no meshi sate
Mata môshi
Kane no hoshiki yo

Que veut-on de plus en ce monde ici-bas
Qu’un bol plein de riz et une nuit au clair de lune ?
De l’argent !

(: Yomo no Akara). « .

 » Les senryû abondent en descriptions concrètes de coutumes et de choses, alors que les kyôka ont tendance à être de caractère plus général et abstrait. Les descriptions de l’amour, dans les kyôka, par ex., utilisent des moyens plus détournés que ceux des senryû : le premier est de manière caractéristique ironique au sujet du poète et de sa vie, le second l’est rarement. Les kyôka traitent des aspects fondamentaux et constants de la vie humaine; et non pas de moments individuels, d’incidents et de phénomènes fortuits. On pourrait même dire que les senryû traitent des expériences d’un jour particulier et d’un lieu spécifique, alors que les kyôka portent sur les expériences de la vie entière. Cela révèle comment les poètes de kyôka étaient en mesure de se situer en dehors de leur expérience personnelle de la vie, tout en restant dans un système social apparemment permanent et inéluctable  » (p.256).

 » Le terme « sharenomesu » (tourner tout en plaisanterie) résume à lui seul ce genre de poésie. À n’en pas douter, les poètes de kyôka étaient le fruit de cette société qui prisait tant le drôle.
À l’époque, aucune croyance religieuse n’empêchait les poètes de kyôka de considérer leur propre mort dans la même optique. (…)

Kueba heru
Nebureba samuru
Yo no naka ni
Chito mezurashiku
Shinu mo negusami

Manger, avoir faim, / Dormir, se réveiller, / C’est normal. / En ce monde ici-bas, / Mourir sera sans doute un divertissement

: Hakurikan Bôun.

C’est le poème composé sur son lit de mort par un poète de kyôka perspicace. La plaisanterie l’emporte sur le trépas. L’humour face à la mort … (…) Dans la littérature japonaise, c’est chez les poètes de kyôka de la fin du XVIII° siècle que cette tendance arrive à son apogée dans ces poèmes qui constituent les meilleurs exemples de la littérature humoristique nippone. La popularité des senryû et des kyôka dura jusqu’au milieu du XIX° siècle.
(…)
Les limites de l’humour japonais avaient été atteintes à la fin du XVIII° siècle, et la drôlerie ne devait plus jouer un rôle si essentiel dans la culture. Au XIX° siècle, notamment vers son milieu, le gouvernement des Tokugawa fut ébranlé par des problèmes domestiques et des menaces extérieures. Les tentatives pour plaider en faveur du système ou l’attaquer n’eurent rien de drôle.  » (p.257/9)

(: Fin de l’Histoire de la Littérature japonaise, par Shuichi Kato, t.2, Éd. Fayard, 1986.)

**

In : Le Char des poèmes… d’Hokusai :

(p.13) : de Sanshûro Katamaru :

Hisakata no / hikari nodokeki Saho hime no / Goten.yama yori / kasumu akebono
Lumière douce de l’aube / de la belle Saho / voilée par la brume / du mont du Palais

Note 27 (p 35) :

La parodie part d’un makura-kotoba (« Hisakata no ») évoquant un poème de Ki no Tomonori :

Hisakata no / hikari nodokki / haru no hi ni / shizu kokoro naku / hana no chiruramu
La lumière douce / du jour printanier / Pourquoi donc ne cessent de tomber / sans sérénité / les fleurs de cerisier

Il évoque aussi un autre poème de type haïkaï-renga, compilé par Sôkan vers 1530-1535 :

La frange de son habit de brume / est légèrement humide / La déesse du printemps Saho / debout répand son urine
°

° « cette comparaison insolite exprime une esthétique expressionniste plutôt inhabituelle. La manière est caractéristique du premier recueil de Sôkan avec ses allusions crues voire scatologiques. (Il fut suggéré) que le compilateur Sôkan manifestait son anti-conformisme face à l’art élégant des poésies « en chaîne » (renga), en plaçant ce poème outrancier en tête de recueil. Il reflétait ainsi la réalité sociale d’une époque instable et tumultueuse.  » (p.36).

De Yashiki no Katamaru (p.20) :

Sakinarabu / aki no hiina no / kamuro-giku / hana koso hoshi no / hayashi kata nare

traduit ainsi (à cause des polysémies, doubles sens,…) :
Elles s’alignent épanouies
en ces jours d’automne / telles des poupées d’automne
les petites kamuro-giku / les apprenties courtisanes°
leurs fleurs telles des étoiles°° / c’est de l’argent qu’elles veulent
foisonnent / disent les musiciens°°°

° Kamuro, chrysanthème; ou jeune ou petit (kamuro-giku, petit chrysanthème… Kamuro-giku est le nom donné à la coiffure des fillettes dont les cheveux sont coupés au niveau des épaules. Dans les quartiers de plaisirs, le terme désigne une fillette de 6 à 14 ans, faisant l’apprentissage de son futur métier auprès d’une courtisane de rang élevé. (note 75).

°° Les 2 derniers vers multiplient les doubles sens. Hana, fleur, argent que le client distribue sous forme de cadeaux dans les quartiers de plaisir. « Hoshi » : étoile, je veux. « Hoshi no hayashi » : forêt d’étoiles – métaphore très répandue depuis le VIII° siècle et qui se encontre dans le Man.yôshû. (note 76)

°°° « Hayashi kata », musiciens accompagnant au tambour ou à la flûte les représentations théâtrales de nô, de kabuki ou de fêtes populaires. Ce kyôka évoque le « oiran doshu », cortège de courtisanes renommées accompagnées de kamura et de hayashi-kata qui se déroulait le 1° jour du 8° mois (en plein automne), à Yoshiwara, quartier de plaisirs d’Edo où vivaient courtisanes, artistes et éditeurs. » (note 77)

De Matsutake no Kasabito (p.22) :

Surusumi mo / urami nigoreru / urokogata / waga tsuno moji o / fumi ni shirasen

traduit ainsi :
Je prépare l’encre / Un cheval tout noir
toute noire des rancoeurs / le célèbre Surusumi °
En forme d’écailles °° / débordant de rancoeur
Ma lettre d’amour / foulera de ses pieds
vous fera avoir mon coeur / ma lettre d’amour

° note 90:  » Surusumi : encre qu’on broie et nom du célèbre cheval noir. Minamoto no Yoritomo, fondateur du bakufu ( premier shôgunat) de Kamakura en 1192 offrit 2 de ses plus beaux chevaux à ses deux sujets Sasaki Takatsuna et Kajiwara Kagesue (ce qui occasionna une grande rivalité entre eux)…

°° note 91 : Uroko-gata. Motif d’écaille triangulaire apparaissant sur le costume du théâtre nô du personnage de la femme jalouse. Ce kyôka fait allusion au haïku composé par Matsuo Bashô (in Edo Sangin, 3 récitations à Edo) :

Kobuton ni / daija no urami / uroko-gata

Le petit coussin / Le gros serpent, sa rancoeur / en forme d’écailles

En continuant de compulser Le Char des poèmes Kyôka de la rivière Isuzu, choix de Senshûan °, illustré par Hokusai, les notes de fin d’ouvrage m’en apprennent de bien bonnes :

° Note 4 : Senshûan, pseudonyme du poète Sandara-hôshi (1731-1814), de son vrai nom Akamatsu Masatsune. Avant de se consacrer au kyôka, il s’intéressait alors plutôt au conte humoristique (shôwa, kyogen) mais semblait entretenir de bonnes relations avec les poètes de kyôka dont Karogoromo Kisshû (1734-1802). () Il dirigea un groupe de poètes et se distingua comme l’un des meilleurs poètes de kyôka. Sa poésie se caractérise par l’humour et l’équilibre…

Note 2 : « Kyôka, litt. poésie folle. La forme est celle du waka de 31 syllabes (5+7+5+7+7) mais les sujets traitent de la vie quotidienne d’une façon anticlassique. Ce genre requiert une large connaissance de la littérature en général comme de l’art et de la rhétorique propre à la parodie (mots-pivots polysémiques, homophonies et homographies, compositions complexes et astucieuses). Cette tradition qui remonte au VIII° siècle, se développe à l’époque Kamakura pour connaître son apogée à l’épque Edo. »

Note 25 : Les 4 saisons … posent les règles du concours : provocation, maîtrise technique absolue des poésies en chaîne (pastiche, jeux de symétrie, polysémie…), attachement à la littérature classique et à l’érudition *, comparaison et identification implicite avec l’un des six poètes sacrés (Rokkasen).

Note 32 :  » Le moine Kisen est l’un des 6 poètes du Parnasse japonais ou 6 poètes immortels (Rokkasen) avec Ariwara no Narihira, le moine Henshô, Ôtomo no Kuronushi, Bunya no Yoshihide et la poétesse Ono no Komachi.  »

* en ce sens, on pourrait dire que le poème de Jean Monod, cité page 14 de l’anthologie du haïku en France, éd Aléas 2003, est un kyôku, qui – sans le nommer – cite Mallarmé :
 » L’absente de tout / bouquet la voilà me dit-il / en se montrant l’aube  »

Note 16 : Tsutaya (ou Tsuta-jû, abrégé de Tsutaya-Jûzaburô, 1750-1797) de son nom, Kôshodô, libraire et éditeur, grand amateur des arts et amis des lettrés, tels (entre autres) Utamaro et Hokusai, était aussi leur mécène. Il publia un grand nombre de livres et d’estampes (…) Son succès le porta au 1° rang des éditeurs d’Edo (pendant environ les 15 dernières années du XVIII° siècle, « qui coîncidaient avec l’âge d’or du kyôka.) Tsutaya édita plusieurs recueils de kyôka dont la présente anthologie, illustrée par Hokusai. »

*

(À suivre … avec quelques exemples de ces kyôkas qui très souvent se réfèrent à, font allusion à, s’inspirent de, évoquent, parodient, pastichent d’autres poètes que ceux cités plus haut, tels Sôkan, Saigyô, Murasaki Shikibu, Sagami – une des 36 poètes immortels (sanjû Rokkasen) – et aussi Bashô, etc. et/ou font intervenir polysémies, etc.)

*

Pour ajouter à mes « Plus sur le kyôka », celui-ci, de Iso no Wakame, p.16 du Char des poèmes kyôka de la rivière Isuzu (: op.cit.) :

Todokanedo / tatsuru misao o / uki hito no / kumite shirekashi / horiido no mizu
Même hors d’atteinte / voici mon coeur fidèle ° / Et toi coeur léger / puise °° et sache / cette eau du puits profond

° : « Misao o tateru » = jurer fidélité ou amour à quelqu’un. Le terme « sao » désigne la perche employée pour mesurer la distance, la hauteur et la profondeur. »

°° : « Kumite » = considérer les désirs de quelqu’un. Ce kyôka parodie un poème de Saigyô in Sanka shû (Recueil de la hutte des montagnes) :

Kumite shiru / hito mo aranan / onozu kara / Horikane no i no / oko no kokoro o *
En puisant de l’eau / sans doute comprendra-t-il / par lui-même / la sincérité du coeur profond / comme l’eau au fond du puits **

* Note du compilateur :
« o », n’est-ce la profondeur (de l’eau) du puits, cette unique allitération, cette unique voyelle la bouche en (« o » du) puits, du dernier vers (mais aussi progressivement tout au long du kyôka =
0 en première ligne
2 en deuxième
2 en troisième
3 en quatrième
7 en cinquième
?)

** le puits de Horikane, situé dans la province de Musashi est un « uta-makura ».

**

Le terme « kyôku » fut revu après la lecture de Writing and Enjoying Haiku (A Hands-on Guide) ; Kodansha International Ed., 2002, pages 154/155 de Jane Reichhold, isbn 4-7700-2886-5.
Au chapitre « Kyôka : Really Mad Poetry » (« Kyôka : une poésie vraiment folle ») : « C’est le côté non-sérieux du tanka… En fait, on utilise le terme également pour des poèmes parfaitement sérieux, qui traitent de l’écriture d’écrivains écrivant sur la forme… En anglais, nous n’avons pas encore fait la distinction entre le tanka sur des sujets plus légers ou le tanka à propos de l’écriture du tanka, mais continuons d’utiliser le même terme pour les deux occurrences. »

**

In L’Anthologie Poétique en Chine et au Japon, Extr.Orient-Extr.Occident, P.U.V. 2003 : l’article de Daniel Struve « Les recueils comiques de kyôka », p.139-163 :

« Très en vogue dans les milieux lettrés de la fin du XVI° siècle, le kyôka connaît alors un véritable âge d’or. (…) Matsunaga Teitoku (1571-1657), disciple de Hosokawa Yûsai et rpincipal promoteur du haikai est aussi considéré comme le fondateur du kyôka de l’époque d’Edo. » (p.140-141)

Le résumé de cet article dit : « Dans le Japon de l’époque d’Edo, l’introduction de l’imprimerie et le succès des genres poétiques comiques du haikai et du kyôka donnent lieu à la compilation de nombreux recueils. L’article retrace l’évolution des recueils du kyôka à partir du milieu du XVII° siècle jusqu’à l’apogée du genre à l’ère Tenmei (1781-1791), en relevant le statut ambigu que conserve tout au long de son histoire ce genre poétique… »

**

: Compilé par Daniel Py, (mai 2007- octobre 2013).

Les 1012 haikai de Bashô – 226)

13 février 2012

°

poésie comique
dans le vent d’hiver j’ai l’air
de Chikusai

(hiver 1684)

NB : Le « kyôku » (« haïkaï comique ») et le « kyôka » (« tanka comique ») sont deux genres différents, mais « kyôka » est le terme le plus ancien, parce que le waka est plus ancien que le haïkaï. On considérait que ces strophes étaient comiques ou folles parce qu’elles se référaient au travail de l’écriture (…). Chikusai était un pauvre médecin-poète qui voyageait en composant des vers drolatiques pour amuser ses patients aux dépens des poètes pompeux.

°

(à suivre : 227-1012)

(En) Défense des kyôku…

25 décembre 2011

(En) Défense des kyôku °, kyôka ° kyôbun °, éventuellement,
° genres qui existent bel et bien depuis quelques centaines d’années au Japon (!) :

Vivre
c’est bien ;
réfléchir
sur la vie
ça peut aider
aussi,
non ?

Écrire haïkus,
écrire senryûs
c’est bien ;
réfléchir
sur haïku
sur senryû
ça peut aider
aussi,
non ?

= c’est le rôle
exact
du kyôku

(qui n’est ni un kyô-ci ni un kyô-ça
ni un kyô-n’importe-quoi
comme certain(s) peu(ven)t l’écrire
– et vouloir vous en persuader
si ignoramment ! *
, non !)

dp.(25/12/11)

* voir, très récemment, sur la liste d' »échanges » « haiku-fr » !

Vacherie- kyôka – Py

27 août 2010

°

(vacherie kyôka :)

On dirait qu’il y en a
qui ne peuvent pas éviter
de se mettre en scène
dans leur haïku
– est-il, sinon, si vide ?

°

d.26/8/10

Kyôkas, kyôkus, Kyôbuns (2)

16 mars 2010

Kyôkas kyôkus kyôbuns .

*

mouvement mo-
derne (cent ans déjà) de
l’à-l’ouest-haïku

*

le kyosaku °
d’un kyôku°° pour éveiller
les haïjins endormis !

° bâton dont le maître zen se sert pour « réveiller » le disciple qui s’assoupit pendant zazen

°° « poème fou » qui peut traiter (comme ici) de l’écriture du haïku.

(5/1/006)

**

‘Hishiryo’ = pensée sans pensées.

*

(Mes) Règles D’Écriture Du Haïku
sous forme de kyôku(s))

RÈGLE N° 1 :

Évitez dans votre
haïku le possible échange
d’un mot par un autre.

N° 2 b) :

Essayez qu’en li-
sant votre haïku, on se
dise : Mais c’est, bien sûr !

2 c)

= Demandez-vous quel

intérêt a le lecteur
à lire votre -ku

/est l’intérêt du lecteur
qui lit votre -ku

2 c)1

ce haïku que s’é-
crit le poète « moderne » ,
qui concerne-t-il ?

N° 4:

a) :

Évitez de far-
cir votre haïku de fa-
tras poétique

(ce qui risque d’en faire : un fatraïku !)

b) :

Évitez de far-
cir votre haïku de fal-
balas poétiques

(ce qui risque d’en faire : un falbalalaïku !)

c) :

Évidez plutôt
votre haïku de tous les
mots qui l’encombrent

d) :

Videz la vessie
du haïku le plus souvent
possible

e) :

Allumez la lan-
terne de votre compré-
hension du haïku

d)1 +e)1

En haïku vaut-il
mieux se mettre le doigt dans
l’oeil ou dans la lune ?

MRDEDH RÈGLE N° 5

Faites en sorte
d’éclairer. Pas d’aveugler.
Ni d’ampouler.

**

KYÔKUS, KYÔKAS et autres (du jour) :

Du haïku n’ont-ils
gardé que l’enveloppe ?
coquille vidée …

°

ce haïku « relooké » :
5/7/5, mot-clef
et quoi d’autre ?

°

le mot-clef
tourne-t-il
à vide
dans la forme 5/7/5 ?

°

haïku « moderne » =
coquillaïku ?

°

(Kyôka-érotique ? :)

ses seins sans rien
qu’un top dessus –
Laisser deviner
au lecteur
ses haïcous

°

le haïku moribond –
réinjectez-lui, par pitié,
un peu de son sens °

° premier, vital, originel !

°

C’est à la source
que jaillit l’eau

du haïku itou !

°

De ce haïku recuit
me reste un goût de cendres …

°

– Manger de ce haï(re)kuit ?
– brûlé !

°

Qu’ouvre le mot-clé
dans cet appartement apparem-
ment vidé ?

°

Quelle est la demeure du haïku ?

°

sur le sol du haïku
vidéserté
un mot-clé

°

Haïku BHV : 5/7/5 et mots-clés

°

Au rayon haïku
des mots-clés
pour serrure 5/7/5 ?

°°

POURSUIVONS LES RÉFORMES :

Ne léchons plus la bave du 5/7/5 !

Ne léchons plus les mots-clés !

°°

Ces reliques
du haïku :
5/7/5
mot-clé,
Vénérerons-nous encore ?

°°

Que reste-t-il de nos amours ?
5/7/5
mot-clé
?
:
pas bandant !

°°

En sommes-nous à l’ère
du haïku gonflable ?

souffler dans le mot-clé
jusqu’à obtenir un 5/7/5 ?

(12/7/06)

*

sous la lune le
haïjin tend sa plume au lec-
teur d’écrire un mot

(20/1/08)

*

Plouf
L’ondulation
traverse l’étang
diminuendo

*

(31/12/005) :

90 – 60 – 90
5 – 7 – 5
haïku – canon

*

un kyôku ? :

joli petit haïkul
qui passe dans la rue
: il en manque cinq !

*

(31/12/005 :)

Le haïku applique
(à la lettre près) ce principe :
 » Ne juge pas  »

Le senryû, lui,
s’en tape !

*

si mon haïku fait
5/7/5 tant mieux

si mon haïku ne fait pas
5/7/5 tant mieux

*

ce n’est pas le 5/7/5
qui fait le haïku

c’est l’esprit-haïku
qui fait – parfois –
5/7/5

*

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Le 5/7/5 est une convention (japonaise)
ni nécessaire en / à l’ occident
ni suffisante
pour faire un haïku

(2/3/06)

*

« mon » kyôku est un poème fou (= son étymologie « kyô », je suppose !) équivalent d’un haïkaï ou d’un senryû, mais qui traite de l’écriture du haïku (de ses techniques, philosophies, enfin tout ce qui touche à son écriture). Il peut être « sérieux », mais je le fais volontiers, personnellement : sarcastique, critique, …(donc, plus « senryû ») . Il peut être incorporé à une pièce plus vaste en prose « folle » le « kyôbun », équivalent du « haibun » bien connu, qui, généralement a trait au même sujet : l’écriture du haïku (sa critique, etc.)

l’escargot des ar
rondissements parisiens
: haïku calibré

(25/7/06)

**

Inroducing KYÔBUN and KYÔKU :

(…) a few examples of ‘kyôku’ (= a ‘really mad’ haiku – or rather senryu – about haiku writing) :

« Modern » ? :
from haiku
they lick
the feet !

laying down their dreams
on the paper’s couch :
psychoanalaiku !

if you need
to explain your haiku
you missed it

(after L.Supova, on haiku-fr’s list, 2006).

a good haijin IS haiku
a bad one MAKES haiku

‘my heart’ , ‘myself’,
‘my memories’, ‘my dreams’… : worn out
themes = romantic haiku !

*

Guillevic tells us :
each poem
creates its form.

(: after Guillevic’s Art Poétique, Gallimard Ed. 1989, p. 125)

*

And now, if you so wish, try also, and … have fun !

**

 » sac-à-couilles !
vidé mon saccaïku  » ,
dirait Saïkaku ?

(24/7/06)

*

(Kyôkus (?) :)

1)
Ne léchons plus la bave du 5/7/5 japonais !

2)

5/7/5, coquille caduque

3)

Fauzaïkus, fuyez !

*

l’extrême-urbain
réclame d’urgence
un retour aux sources
naturelles

( : d’où le haïku ! / ? )

28/7/06

*

(25/7/06 :)

ressasser sans cesse
en sa bouche ses mots
pour polir le poème

*

(27/6/06)

se vider l’esprit
se vider la tête
se ressourcer

*

soignons-nous, soignons
l’humanité avec des
haïkus NATURELS !

*

Se vider les yeux
se vider les oreilles
– petits oiseaux

(14-16/7/06)

*
métro-philo-kyôku du jour :

serons-nous tous ain-
si entassés dans la mort ?
l’alouette, le crapaud,

(30/6/06)

**

Le haïku, n’est-ce
ce point G de l’
 » étanGrenouille  » ?

(28/9 – 2/10/06)

*

coquille clavier :
en place d’éphémère
taper éphépère

(26-9/3-10-06)

*

en trois lignes
prendre le temps
de ne pas dire

(5/9/6)

*

à vue de nez,
pas zen (?)

**

Panse au soleil
la chatte

: c’est Loulou, dans la chambre d’Elsa qui revient ce soir de 5 jours de classe de mer en Bretagne-Sud, avec ses petits copains de sa classe de CP –
ce qui me tire vers ces mots, à propos du chapitre de Shuichi Kato sur Bashô (dans Histoire de la littérature japonaise – Tome 2, page 126 – Éd. Fayard, 1986) :
 » … Produire un haïku « de vos propres pensées » signifie l’écrire non pas à partir d’une expérience directe mais le créer sciemment. Il est évident que Bashô prisait l’expression de l’expérience directe.  »

Le haïku qui pEnse
et
le haïku qui pAnse !

Il y a(urait) donc deux sortes de haïkus :

– les haïkus de tête
(ça peut être aussi des haïkus que l’on fait avec les pieds
(: pointure standard = 5/7/5))

et

– les haïkus de coeur
(d’instinct, d’inspir, de tripes …)

**

(D’après mes lectures de : La Grande Image Est Sans Forme
de F. Jullien
et en transposant au haïku …? :

Le haïku comme art de l’esquisse ? …

_

cf :  » Bashô lui-même disait que les meilleurs haïkaï montrent moins de la moitié de leur sujet.
 »
: Eric Amman, in : Le Poème Sans Mots, Éd. Gammes, 2006, p.8.

**

Débarrasse,
Fais du vide,
Éclaircis le regard

(2/1/06)

**

Petit essai d’onomato-haïku

OU

 » Je vous onomatoplaît-il ? « ,
petite suite ébouriffante et vacharde
(+ une question angoissée).

1)

cri cri cri cri cri
c’est qui ? C’est la souris qui
s’essaie au haïku

2)

cri cri cri cri cri
Qui c’est ? C’est le criquet qui
crie sa poésie

3)

glou glou glou glou glou
Qui c’est ? C’est l’éléphant qui
se lave les dents °

° méfiez-vous des verres
à dents d’éléphants !

4)

Attention, voici
qu’il onomatopète
des mots des modems …

5)

L’onomatopoète

compte sur ses doigts
son nombre de pieds

6)

le jardinier fait pousser
ses tomates – le poète
onomatopète

7)

Prout, Prout, Prout, Prout, Prout,
fait-il, le poètomane ?

8)

Quel temps fait-il ?
Ploc Ploc Ploc Ploc Ploc Ploc Ploc °
: un haïku !

° là, j’ai voulu signifier que le toit pouvait fuir

9)

Plouf Plouf Plouf Plouf Plouf
c’est un haïku qui prend l’eau
Plouf Plouf Plouf Plouf Plouf

10)

rien rien rien rien rien
rien rien rien rien rien rien rien °
rien rien rien rien rien

° c’est toujours ça de rempli !

+ 1)

le haïku va-t-il
devenir une fabrique
d’automatopets ?

12)

Ouverture de la
chasse Pan Pan Pan Pan Pan Pan
Pan Pan Pan haïku

13)

un train teuf teuf teuf
qui s’active teuf teuf teuf teuf
quel beau haïku teuf

(25-27/9/05)

**

le « haïku » °
comme un kôan (?)
proposé au lecteur

*

Au lecteur
de résoudre
le haïku

(3/11/06)

*

Ne dire que ce qui est –
Dépouiller le haïku
de ses pensées …

(28/10/06)

*
raboter, poncer,
lisser, limer, patiner,
luire

(2/11/06)

*

moineau qui se pose
sur le sol du jardin
, haïku

(28/4/007)

**

Laisser / Mettre
le plus d’espace possible

entre les deux propositions
(/ pôles) du haïku

° : afin de créer « la » tension …

*

À tout soigneur tout honneur ! :
Le haïku nous débarrasse
des tiques poétiques

(21/11/06)

*

Effacer
c’est aussi
nous effacer ?

: pas facile !

(21/11/06)

*

L’avaleur de silence(s)
ignore
la valeur du silence

(19/11/06)

*

l’habile haïjin
arrive
à ne point nommer

(19/11/06)

*

le haïku
ce sont des briques
sans ciment

(21/11/06)

le haïku
est un navet qui pointe
dans la direction

(24/11/06)

Montrant le chemin / la voie
Avec un navet-haïku
?

(21/5/007)

*

Écrire un haïku
c’est montrer le décor.
pas le décorateur !

(23/12/07)

**

cric cric cric cric cric
la roue de la fortune
grince — De l’huile !

(24/11/06)

**

un poème fou :

lui
déchirant
la chair

au pèle-
bébé

Betterave

**

Que deviendront ses poèmes ?

. . . . . . Rien

. . . . . . Rien

. . . . . . Rien

bulles à la surface du son

(23/11/06)

*

THÉORIE DU TERRAIN VAGUE 2) :

entre haïku
et tanka
un no man’s land
contemporain :

le ku-tan (/tan-ku)
(ou : haï-ka)

(27/2/007)

*

(Kyôku/ku-sen :)

instants
« à peine saisis »
au vol des mots

feuilles du platane

(3/12/06)

*

(kyôku :)

ils n’ont pas voulu
se vider de mots –
Ils ne veulent que
s’engraisser °

° = la Grande Bouffe du haïku (?)

*

(kyôku :)

Ô haïku,
Délivrez-nous des mots ! °

° : les maux des mots ?

*

Excusez-moi,
je suis (follement) kyôku-p. !

***

S’amenuiser, menuisier !

: Planche à raboter
tes mots !

(29/11/06)

*

(mon) haïku :

aussi
simple que
possible

(my) haiku :

as
simple
as
possible

(10/8/07)

*

1) bis :

Le haïku (/haïkaï) est le son d’une seule main

(4/12/06)

*

l’habile haïjin
arrive
à ne point nommer

(19/11/06)

*

Ce à quoi il faut accorder le plus d’importance dans l’écriture du haïku, c’est le
non-dire,
l’espace,
l’en-creux.

(Non l’encre
mais l’en-creux
de l’encre)

non seulement le noir
mais le blanc
complémentaire,

indissociables.

(4/12/06)

*

à P.P., à Neko, qui ont permis ce kyôku, lors du dîner à l’Indonesia, le 25/11/06 à Paris :

Sonotone :
mot de saison
pour haïku-phènes

**

entre branche et sol
l’envol d’un instant
-haïku

(9/12/06)

*

Havoc Chaos :

Que l’informatique
casse

et notre monde
s’écroule

soleil, piafs, pigeons

(12/12/06)

**

riz riz riz riz riz
riz riz riz riz riz riz riz
riz riz grain à grain

(30/9/07)

*

mettre des mots
partout, sur tout, ah,
la sale maladie !

(2/12/06)

*

Les mots comme des nuages venus
et repartis

(30/11/06)

*

L’habile haïjin
arrive
à moins nommer

**

Point de vue du yojôïste (1ter) :

Le haïku (/ haïkaï) est

– une demi-lune.

– un iceberg de mots.

( une part de mots
9 parts de silence ?) …

(4/12/06)

*

Point de vue du yojôïste (4 bis) :

1°)
Ouvrir le poème

2°)
– L’évider, (l’éviscérer ?)
– En le vidant, faisant y passer de l’air, du vide, du creux
d’un pôle à l’autre (« yojô »), (y faire la part) du silence,
le plus de silence possible °
(= paradoxe)

– Le condenser, concentrer, centrer :
lui donner compacité, force …

**

le silence,
ça vous dit ?

(2/12/06)

*

Le point de vue du yojôïste (4) :

Nettoyer le « haïtruc » de tout ce qui l’encombre,
( ex : mots (répétitifs)…
adjectifs, verbes, adverbes )
, le bouche, le ferme, le complète (l’achève),
( ex : mots-chevilles, coordinations, conjonctions, mots inertes (mots morts ?) )
, le remplit… le satisfait …

(2/12/06)

*

Point de vue du « yojôïste » :

le haïku (/haïkaï) est un réducteur
de mots

(4/12/06)

*

Rubrique : Le point de vue du « yojôïste » – starting December 4th, 2006 :

Il y en a pour qui, dirait-on, le haïku est un jeu poétique de remplissage (, un légo de mots). Ceux-là ont tout faux :
Le haïku est une demi-poire.

°°°

« Aimez-vous Brâme ? »
: Françoise STAG°ant

(12/3/007)

° angl. « stag » = cerf.

**

Senryûs =
travers d’hommes
– travers de porcs ?

(13/8/07)

*

plein les bouches
des Barthes, Bonnefoy, …
: où sont leurs haïkus ?

(17/2/007)

*

après le sudoku
dernier jeu à la mode :
le haïku ?

(18/2/007)

*

cailloux, choux, haïkoux
– il me manque sept syllabes –
kaï-kaï – ouille ! ouille ! ouille !

(3/1/007)

*

certains emplissent
leur haïku – mais oublient
de le vider

(1/1/007)

*

deux mouvements nécessaires
à l’écriture du haïku :

1) des mots

2) des dé-mots

*

(r)emplir
le haïku
(le) vider

*

équilibrer le haïku
entre plein
et vide

*

inspirer – expirer
tel doit
le haïku

*

un haïku rempli est bouché

*

de l’importance
du lâcher de mots
en haïku

*

lui permettre de respirer

(1/1/007)

*

1°) « mon » kyôku est un poème fou (= son étymologie « kyô », je suppose !) équivalent d’un haïku ou d’un senryû (: plutôt, pour ma part !) mais qui traite de l’écriture du haïku (de ses techniques, philosophies, enfin tout ce qui touche à son écriture). Il peut être « sérieux », mais je le fais volontiers, personnellement : sarcastique, critique, …(donc, plus « senryû ») . Il peut être incorporé à une pièce plus vaste en prose « folle » le « kyôbun », équivalent du « haibun » bien connu, qui, généralement a trait au même sujet : l’écriture du haïku (sa critique, etc.) Est-ce plus clair ?

rencontrés sur Internet
ils prénomment leur enfant
Yahoo

(Youppie !)

*

(10/9/07)

le haïku
ne tourne pas autour du pot,

il tend le pot.

(23/12/06)

*

inincontinent
la dérive du haïku
international

(30/1/007)

*

me moquant de ceux qui
à tout prix
veulent cinq-sept-cinquer

*

un kyôku (en 5-7-libre) :

une seule gou
tte de haïku : poison vio
lent

*

voir,
faire voir :

ni plus
ni moins

(18/1/007)

*

rien rien rien rien rien
rien rien rien rien rien rien rien
rien rien rien rien rien

*

ils rient
d’un rien
d’un grain de riz …

(30/9/07)

**

Kyôbun (pour Meriem) :

Simplicité,
brièveté,
réalité,

: voilà trois qualités de base du haïkaï (/ haïku)
et du
haïkiste …

: voilà pourquoi le haïku est plus qu’une forme de poésie, qu’une esthétique;
il est aussi un art de « vivre » °°, une éthique.

°° / de (se) réaliser.

**

tout travail est, idéalement, travail sur soi …

*

Haïku, Haïjin,
sois:
simple
bref
vrai

*

Kyôka :

Ils tiquent à l’éthique
l’étiquetant
étique

et pourtant,
et pourtant ! …

(23/2/007)

*

Pour le libraire,
Le moineau à une patte (d’Hosaï)
devient :

Le moine à une patte

(Librairie de Paris, 20/2/2007)

*

court
au long
cours

bref,
la brévitude !

(23/2/007)

*

kyôku – sur le thème des odeurs (à propos de l’AFH ?) :

ça sent mauvais le(s)
premier(s) rat(s) quitte(nt) le na
vire

(20/2/007)

*

Le voleur de Ryôkan
n’a pas pu
décrocher la lune

(2/3/007)

*

rient rient rient rient rient
rient rient rient rient rient rient rient
rient rient rient d’un rien

(30/9/07)

*

kyôka (allitératif) :

Refus
Réitéré de
Rubriques pour la
Revue °

: démission.

(11/3/007)

° : Gong

**

Kyôbun :

En lisant La faim du tigre de R. Barjavel, hier :
 » un mythe vidé et conservé par des artifices est comme un corps vidé de son sang et conservé par des aromates : une momie desséchée, caricature de l’organisme vivant qu’elle fut autrefois.  » (: p191/192, Folio, n° 847)
, m’est venu ce kyôku :

Le haïku d’aujourd’hui
est-il une caricature
du haïku d’autrefois ?

(16/11/06)

**

Le dit de la gomme :

Ma tâche :
Effacer
les taches !

(26/2/007)

*

Le haïkou de gong
s’éloigne
– repos

(11/3/007)

*

riz riz riz riz riz
riz riz riz riz riz riz riz
riz riz grain à grain

(30/9/07)

souris

*

Sur  » L’île de la Tentation  » °
je ne vois que des canons –
État de siège

(23/8/07)

° = série télévisée française endémollesque°° (ou autre endémollusque ?)

Endémol : maison de production de cette série et de bien d’autres…

*

 » Spécial Pâques
Joignez  » deux petits oeufs
 » à votre bouquet  »

(2/4/007)

*

le 5/5/7
un haïkou
tordu
?

5/5/7
a warped
haiku
?

*

elle lit un livre
son corsage est échancré
… rondeur des mots

(Ligne 2, 7/5/007)

*

 » Je à volonté  » (kyôka pour Francis T.):

je je je je je
je je je je je je je
je je je je je

(5/12/07)

*

2 kyôkus, 1 kyôka – Théories -ku
1) :

Le haïku
c’est l’art d’inachever
le haïku

au chevet
du haïku
achevé !

Allez, cherche, lecteur,

cherche la fin
du poème

– s’il en a une !

(12/4/007)

*

2 expressions kyôka-sses :

Ressusciter d’entre les mores

Onji soit qui mal y pense

(20/4/007)

**

 » Le groupe haïku-fr n’est pas correct  »
ce soir :
Yahoo déconne

(17/12/07)

*

corneilles crieuses
l’heure du kukaï

(31/3/007)

*

le haïku tend vers le silence (du sens)

Dire par petites touches

Sur les bulles
saute la casserole

(1/4/007)

*

je lis, en première page
 » la campagne se durcit « .
– La ville mollirait-elle ?

(5?/4/007)

*

kyôku ? :

pétales en légère neige
tout autour

ainsi du haïku ?

(20/4/007)

*

Des Ici et des Maintenant,
il y en a tout le temps
– besoin de quoi d’autre ?

(23/12/07)

*

Équilibrer le haïku (2) – « Kyôku » :

Élaguer –
Dénuder :
À l’os , À l’os !

(11/12/07)

*

Kyôkuà la Moritake :

dernier octobre
les ailes des pigeons
remontent aux arbres

(31/10/07)

*

Kyôkuà la Carpe Diem : « Jours d’hiver »

tel l’instant-haïku,
le film-renku
avant qu’il ne disparaisse

(31/10/07)

*

sur sa fesse
comptant les pieds
de mon haïku

(22/12/07)

*

Trouver
dans l' »extrême modernité » en haïku
un palliatif
au manque d’inspiration ?

(20/11/07)

*

Gong II,
une revue
qui exalte le cul-
te du petit soi ?

(17/1/08)

*

En lisant la revue Gong (AFH II), Kyôbun :

Le haïku, ce n’est pas :
À la recherche du nombril perdu.

Un haïku, c’est
orienter le miroir
– de soi vers le monde
– du personnel vers l’universel
– de la nature humaine vers La Nature.

Dans la boîte haïklous
maints haïklous
sont tordus

(= Haïkloun à la Hôsai).

(13-14/1/08)

**

Kyôbun : Un compte-rendu de l’AG de l’AFH :

dossier de chaise –
un moineau brièvement
assiste à l’A.G.

Georges se lève pour ouvrir
la baie
l’oiseau l’ignore

le soleil entre
par les vitres
l’oiseau ne sort pas

signé : l’âgé de l’AFH

**

kyôku est un terme japonais ancien, qui signifie « poème fou « . C’est ici une réflexion
critique, voire satirique, façon senryû, sur l' »art poétique » du haïku.
Exemples :

couchant leurs rêves
sur le divan du papier
: psychanalaïku

autre :

« orientalisme
occidentalisé » ° :
ce haïku « moderne » ?

° expression de Philippe Delerm, dans : « La sieste assassinée« , Gallimard, 2001

*

le kyôku (comme le senryû – ou même encore plus fou que le senryû ?) est un poème « fou », « guedin », etc.
et qu’il n’y a donc pas qu’un thème  » fou fou fou ! » alors… ça reste à « inventer », à développer, ce concept ((car le Kyôka, son grand frère = 5 lignes, contre 3 au kyôku, normalement ! = peut désigner les deux : un tanka sur l’écriture du tanka, et un tanka pas sérieux du tout…))
Alors, les deux directions sont permises – mais c’est vrai qu’un kyôku juste fou, peut coller (plus directement) au senryû, alors ! …et que la barrière est bien floue ! …

*

Un kyôbun (= haïbun sur le haïku) :

ÉQUILIBRE :

Aère ton haïku
Fais-y des fenêtres
creuse
. . . . . ses trous ,
respire !

entre plein
et vide
le haïku

(4/1/08)

*

kyôkus :

a)

mon voeu le plus cher :
que l’Esprit originel
du haïkaï perdure

b)

sans cesse remonter
aux sources pour goûter l’eau
de la montagne-haïku

(2006)

*


POUIL
LER !

(25/2/08)

*

Plouf !
Dans l’étang
un lingot dort

(26/1/08), = un bashôtage/kyôku !

*

Tôkyôku ! ( = un Tô-kyôbun !) :

50 000 recueils
au musée du haïku de Tôkyô °

– et moi et moi et moi ?

: Voir les paroles de la chanson de Jacques Dutronc :
 » 700 millions de petits Chinois
et moi et moi et moi …  »

° nous apprend Janick Belleau dans son haïbun  » Tôkyô féminin et Nature
page 35 de Gong 18.

(22/1/08)

°°°

d.

Kyôka, Kyôku, Kyôbun 1)

16 mars 2010

Kyôka, Kyôku, Kyôbun

On pourra consulter avec profit les ouvrages suivants :

– La Littérature Japonaise, par R. Bersihand, PUF, 1957, p.62.
– Un haïku satirique, le senryû, par J.Cholley, POF, 1981, p.15, 46, etc.
– Pour avoir des renseignements sur tous ces genres (« secondaires » au haïku), on pourra Histoire de la littérature japonaise T.2, par Schuichi Kato, Fayard, 1986, p. 246-259.
– Le Char des poèmes de la rivière Isuzu, Kyôka de Hokusai, In Medias Res, 2000
– Writing and Enjoying Haiku, by Jane Reichhold, Kodansha Int., 2002
– L’Anthologie poétique en Chine et au Japon, revue Extrême-Orient – Extrême-Occident, n°25, p.139-163 : « Les recueils comiques de kyôka » par Daniel Struve,
PUV Saint-Denis, 2003.

***

– In La Littérature Japonaise, par R. Bersihand, PUF 1957,
p.62, on peut lire :

« On doit signaler encore deux genres secondaires : le « kyôka » (« poésie folle »), une sorte de « tanka » comique, et le kyôku (« vers fous »), ou « senryû », un « haïkaï » humoristique. (…) Ce sont souvent des parodies de poèmes réputés. Le « kyôka » existait dès le XII° siècle; il se développa au XVI° siècle, et fleurit dans la période Tokugawa. Le « kyôku » apparut à cette même époque. Tous les deux connurent la plus grande faveur au XVIII° siècle.
Enfin, de même que le « haïbun » correspond au « haïkaï », de même au « kyôka » correspond le « kyôbun » ou « ‘composition folle ». Ce dernier est pratiqué par les poètes de « kyôka » et par les auteurs de romans comiques, tel Samba. »

***

Le dernier paragraphe de l’Histoire de la Littérature japonaise par Schuichi Kato, Tome 2
Éd Fayard / Intertextes, 1986, isbn 2-213-01709-3
s’intitule :

 » la littérature du rire  »

(il couvre les pages 246 à 259)

En voici quelques extraits :

 » La tragédie des pièces où il était question de double suicide fut compensée par l’humour
des vers comiques (kyôku et kyôka) et par des histoires drolatiques (kobanashi).  » (p.246).

 » Nous trouvons 3 formes principales de littérature humoristique dans la 2° moitié du
XVIII° siècle; aucune n’était nouvelle. Les origines du « kyôku » (sorte de « haïku »
humoristique) remontent à l' »Inu tsukubashû » et celle du kyôka (« poésie folle », forme
humoristique de « tanka ») aux poèmes drolatiques dits « odoke uta » de l’époque de Heian.
Quant aux histoires dites « kobanashi » (…)
Les « chônin » et les samouraïs qui écrivaient des vers humoristiques se prévalurent de ces formes établies, en amplifièrent les thèmes et en modifièrent, dans une certaine mesure, le caractère de l’humour pour en faire une forme culturelle qui convienne à l’époque et qui en soit caractéristique.  » (p.248).

 » Karai Senryû (1718-1790), chônin d’Edo, publia en 1765 la première partie du recueil de « kyôku » intitulé « Haifû yanagidaru »;
Kimura Bôun, samouraï de rang inférieur et poète de « kyôka » ( 1719-1783) réunit une anthologie de kobanashi qui fut publiée en 1773 (…) et
Yomo no Akara (1749-1823) compila en 1783 une des premières anthologies de « kyôka »,
le « Bansai kyôkashû » (Recueil d’une kyrielle de kyôka). (…)
Senryû réunit encore 23 compilations vers la fin de sa vie ; et que 167 autres recueils
aient été créés témoigne de la popularité de cette forme. On donna à ce genre de vers le
nom du poète, et désormais on connaît les kyôku sous la désignation de senryû.(…). Les thèmes, pour la plupart, sont ceux de la vie quotidienne d’Edo, mais on y trouve également des vers au sujet des personnages célèbres du No, du kabuki et de classiques populaires,
comme le « Taikekiki » et l' »Ise monogatari ».
Les thèmes de la vie bourgeoise sont multiples, y compris les rapports familiaux (entre
mari et femme, parents et enfants, épouse et belle-mère), coiffeurs, menuisiers, moines
itinérants, nourrices, servantes, réunions bouddhiques pour prière en commun, pièces de
théâtre, aliments et boissons.  » (p.248/9)

 » Voici un vers bien connu au sujet d’une union qui laisse à désirer :

Tana naka de
Shiranu wa teishu
Hitori nari

Dans le quartier,
un seul l’ignore –
le mari

Mais la vaste majorité des senryû traitent des rapports sexuels. Dans beaucoup d’entre eux
l’action se déroule dans le Yoshiwara (= quartier des plaisirs d’Edo) ; certains autres
traitent du double suicide. D’autres encore concernent les femmes de la cour shôgunale,
leurs aphrodisiaques, godemichés et appareils anticonceptionnels. Il ne s’agit presque
jamais de la vie paysanne ou du paysage des provinces. (…) le chônin d’Edo, tel que les
senryû le révèlent, se suffit à lui-même, est oublieux du monde à venir et fort peu
conscient de celui en dehors de la ville.  » (p.249/50)

 » Pourtant on se moque également des samouraïs. (…)
On trouve également des satires au sujet de moines et de médecins :

Isha shû wa
Jisei wo homete
Tataretari

Ayant loué le dernier poème° du défunt,
Le médecin s’en va.

: p.250/1

° = Jisei = poème de mort (cf aussi : Japanese Death Poems, le livre de Yoël Hoffmann
paru aux éd. Tuttle, 1986, isbn 0-8048-3179-3).

 » Il est évident que les senryû et les kobanashi ot des similitudes de thèmes et d’humour.
On trouve jeux de mots, plaisanteries sur le quotidien, et légers malentendus
psychologiques, railleries peu sévères, anachronismes délibérés; et, à l’occasion, on se
moque des conventions sexuelles (..) (p.252)

 » Les kyôka étaient quelque peu différents de ces formes. L’époque la plus connue pour
ces versions comiques de tanka est sans doute celle de Temmei (1781-1788), pendant
laquelle elles jouirent d’une grande popularité parmi les intellectuels guerriers et certains chônin littéraires. À la différence des senryû, les kyôka étaient attribués à des poètes spécifiques lorsqu’ils furent réunis dans des recueils (…) Les noms des poètes les plus célèbres de l’époque se trouvent dans le recueil « Azuma-buri kyôka bunko » (Recueil de poèmes comiques à la manière d’Azuma), publié par Yadoya no Meshinori, agrémenté de portraits par Kitao Masanobu et de calligraphies du pinceau de Yomo no Akara. On y trouve le portrait de 50 poètes accompagné d’un kyôka de chacun.  » : p. 252/3.

(C’est le principe exact du livre Le Char des poèmes Kyôka de la rivière Isuzu illustré par
Hokusaï ; éd. In Medias Res, 2000; isbn 2-9511719-1-9 = un kyôka et le portrait de son
auteur.)

 » La moitié étaient des samouraï, l’autre moitié des chônin. (…)
Des kyôka furent aussi écrits par des savants (…), par des peintres de l’école Kanô, par des
acteurs (…) et par des courtisanes.  » : p.253/4

 » Il fallait, pour écrire des kyôka, une certaine instruction littéraire, ce qui imposait des
limites à leur popularité parmi les chônin. (…) La forme préférée du kyôka était la parodie
de tankas célèbres (…)  » : p.254

 » Nous avons déjà dit que les kyôka pouvaient comporter la critique politique et la satire
sociale, mais à quelques rares exceptions près, la poésie lyrique japonaise avait évité le
commentaire politique et social et les kyôka, en général, se conformèrent à la tradition. Le
domaine de la poésie comique, comme celui du waka, était celui de tous les jours,
s’intéressant surtout au monde d’ici-bas, dominé par les valeurs ordinaires et hédonistes.
Et là, les kyôka n’étaient pas différents des senryû. Les soucis principaux des poètes de
kyôka étaient l’amour, le vin et l’argent. (…)

Yo no naka wa
Itsu mo tsuki yo ni
Kome no meshi sate
Mata môshi
Kane no hoshiki yo

Que veut-on de plus en ce monde ici-bas
Qu’un bol plein de riz et une nuit au clair de lune ?
De l’argent !

(: Yomo no Akara). : p.255/6.

 » Les senryû abondent en descriptions concrètes de coutumes et de choses, alors que les kyôka () ont tendance à être de caractère plus général et abstrait. Les descriptions de l’amour, dans les kyôka, par ex., utilisent des moyens plus détournés que ceux des senryû : le premier est de manière caractéristique ironique au sujet du poète et de sa vie, le second l’est rarement. Les kyôka traitent des aspects fondamentaux et constants de la vie humaine; et non pas de moments individuels, d’incidents et de phénomènes fortuits. On pourrait même dire que les senryû traitent des expériences d’un jour particulier et d’un lieu spécifique, alors que les kyôka portent sur les expériences de la vie entière. Cela révèle comment les poètes de kyôka étaient en mesure de se situer en dehors de leur expérience personnelle de la vie, tout en restant dans un système social apparemment permanent et inéluctable  » : p.256.

 » Le terme « sharenomesu » (tourner tout en plaisanterie) résume à lui seul ce genre de poésie. À n’en pas douter, les poètes de kyôka étaient le fruit de cette société qui prisait tant le drôle.
À l’époque, aucune croyance religieuse n’empêchait les poètes de kyôka de considérer leur propre mort dans la même optique. (…)

Kueba heru
Nebureba samuru
Yo no naka ni
Chito mezurashiku
Shinu mo negusami

Manger, avoir faim, / Dormir, se réveiller, / C’est normal. / En ce monde ici-bas, / Mourir sera sans doute un divertissement

: Hakurikan Bôun.

C’est le poème composé sur son lit de mort par un poète de kyôka perspicace. La plaisanterie l’emporte sur le trépas. L’humour face à la mort … (…) Dans la littérature japonaise, c’est chez les poètes de kyôka de la fin du XVIII° siècle que cette tendance arrive à son apogée dans ces poèmes qui constituent les meilleurs exemples de la littérature humoristique nippone. La popularité des senryû et des kyôka dura jusqu’au milieu du XIX° siècle.
(…)
Les limites de l’humour japonais avaient été atteintes à la fin du XVIII° siècle, et la drôlerie ne devait plus jouer un rôle si essentiel dans la culture. Au XIX° siècle, notamment vers son milieu, le gouvernement des Tokugawa fut ébranlé par des problèmes domestiques et des menaces extérieures. Les tentatives pour plaider en faveur du système ou l’attaquer n’eurent rien de drôle.  » (p.257/9)

: FIN de l’Histoire de la Littérature japonaise, par Shuichi Kato, t.2, Éd. Fayard, 1986.

**

In : Le Char des poèmes… d’Hokusai :

(p.13) : de Sanshûro Katamaru :

Hisakata no / hikari nodokeki Saho hime no / Goten.yama yori / kasumu akebono
Lumière douce de l’aube / de la belle Saho / voilée par la brume / du mont du Palais

avec la note 27 explicative (p 35) :

La parodie part d’un makura-kotoba (« Hisakata no ») évoquant un poème de Ki no Tomonori (…) :

Hisakata no / hikari nodokki / haru no hi ni / shizu kokoro naku / hana no chiruramu

La lumière douce / du jour printanier / Pourquoi donc ne cessent de tomber / sans sérénité / les fleurs de cerisier

Il évoque aussi un autre poème de type haïkaï-renga (…) compilé par Sôkan vers 1530-1535 :

La frange de son habit de brume / est légèrement humide / La déesse du printemps Saho / debout répand son urine°

° « cette comparaison insolite exprime une esthétique expressionniste plutôt inhabituelle. La manière est caractéristique du premier recueil de Sôkan avec ses allusions crues voire scatologiques. (Il fut suggéré) que le compilateur Sôkan manifestait son anti-conformisme face à l’art élégant des poésies « en chaîne » (renga), en plaçant ce poème outrancier en tête de recueil. Il reflétait ainsi la réalité sociale d’une époque instable et tumultueuse.  » (p.36).

*

De Yashiki no Katamaru (p.20) :

Sakinarabu / aki no hiina no / kamuro-giku / hana koso hoshi no / hayashi kata nare
traduit ainsi (à cause des polysémies, doubles sens,…) :
Elles s’alignent épanouies
en ces jours d’automne / telles des poupées d’automne
les petites kamuro-giku / les apprenties courtisanes°
leurs fleurs telles des étoiles°° / c’est de l’argent qu’elles veulent
foisonnent / disent les musiciens°°°

° Kamuro, chrysanthème; ou jeune ou petit (kamuro-giku, petit chrysanthème… Kamuro-giku est le nom donné à la coiffure des fillettes dont les cheveux sont coupés au niveau des épaules. Dans les quartiers de plaisirs, le terme désigne une fillette de 6 à 14 ans, faisant l’apprentissage de son futur métier auprès d’une courtisane de rang élevé. (note 75).

°° Les 2 derniers vers multiplient les doubles sens. Hana, fleur, argent que le client distribue sous forme de cadeaux dans les quartiers de plaisir. « Hoshi » : étoile, je veux. « Hoshi no hayashi » : forêt d’étoiles – métaphore très répandue depuis le VIII° siècle et qui se encontre dans le Man.yôshû. (note 76)

°°° « Hayashi kata », musiciens accompagnant au tambour ou à la flûte les représentations théâtrales de nô, de kabuki ou de fêtes populaires.(..) Ce kyôka évoque le « oiran doshu », cortège de courtisanes renommées accompagnées de kamura et de hayashi-kata qui se déroulait le 1° jour du 8° mois (en plein automne), à Yoshiwara, quartier de plaisirs d’Edo où vivaient courtisanes, artistes et éditeurs. » (note 77)

*

De Matsutake no Kasabito (p.22) :

Surusumi mo / urami nigoreru / urokogata / waga tsuno moji o / fumi ni shirasen

traduit ainsi :
Je prépare l’encre / Un cheval tout noir
toute noire des rancoeurs / le célèbre Surusumi °
En forme d’écailles °° / débordant de rancoeur
Ma lettre d’amour / foulera de ses pieds
vous fera avoir mon coeur / ma lettre d’amour

° note 90 :  » Surusumi : encre qu’on broie et nom du célèbre cheval noir. Minamoto no Yoritomo, fondateur du bakufu ( premier shôgunat) de Kamakura en 1192 offrit 2 de ses plus beaux chevaux à ses deux sujets Sasaki Takatsuna et Kajiwara Kagesue (ce qui occasionna une grande rivalité entre eux)…

°° note 91 : Uroko-gata. Motif d’écaille triangulaire apparaissant sur le costume du théâtre nô du personnage de la femme jalouse. Ce kyôka fait allusion au haïku composé par Matsuo Bashô (in Edo Sangin, 3 récitations à Edo) :

Kobuton ni / daija no urami / uroko-gata
Le petit coussin / Le gros serpent, sa rancoeur / en forme d’écailles

En continuant à compulser
Le Char des poèmes Kyôka de la rivière Isuzu, choix de Senshûan °, illustré par Hokusai.
Éd In Medias Res, Paris, 2000
ISBN : 2-9511719-1-9
48 p., 20,12 €

les notes de fin d’ouvrage m’en apprennent de bien bonnes :

° Senshûan (note 4), pseudonyme du poète Sandara-hôshi (1731-1814), de son vrai nom Akamatsu Masatsune.(…) Avant de se consacrer au kyôka () il s’intéressait alors plutôt au conte humoristique (shôwa, kyogen) mais semblait entretenirde bonnes relations avec les poètes de kyôka dont Karogoromo Kisshû (1734-1802). () Il dirigea un groupe de poètes et se distingua comme l’un des meilleurs poètes de kyôka. Sa poésie se caractérise par l’humour et l’équilibre…

note 2 :  » Kyôka, litt. poésie folle. La forme est celle du waka de 31 syllabes (5+7+5+7+7) mais les sujets traitent de la vie quotidienne d’une façon anticlassique. Ce genre requiert une large connaissance de la littérature en général comme de l’art et de la rhétorique propre à la parodie (mots-pivots polysémiques, homophonies et homographies, compositions complexes et astucieuses). Cette tradition qui remonte au VIII° siècle, se développe à l’époque Kamakura pour connaître son apogée à l’épque Edo.

note 25 : Les 4 saisons (…) posent les règles du concours : provocation, maîtrise technique absolue des poésies en chaîne (pastiche, jeux de symétrie, polysémie…), attachement à la littérature classique et à l’érudition *, comparaison et identification implicite avec l’un des six poètes sacrés (Rokkasen).

note 32 :  » Le moine Kisen est l’un des 6 poètes du Parnasse japonais ou 6 poètes immortels (Rokkasen) avec Ariwara no Narihira, le moine Henshô, Ôtomo no Kuronushi, Bunya no Yoshihide et la poétesse Ono no Komachi.  »

* en ce sens, on pourrait dire que le poème de Jean Monod, cité page 14 de l’anthologie du haïku en France, éd Aléas 2003, est un kyôku, qui, sans le nommer, cite Mallarmé :

 » L’absente de tout / bouquet la voilà me dit-il / en se montrant l’aube  »

*

note 16 : Tsutaya (ou Tsuta-jû, abrégé de Tsutaya-Jûzaburô, 1750-1797) de son nom, Kôshodô, libraire et éditeur, grand amateur des arts et amis des lettrés, tels (entre autres) Utamaro et Hokusai, était aussi leur mécène. Il publia un grand nombre de livres et d’estampes (…) Son succès le porta au 1° rang des éditeurs d’Edo (pendant environ les 15 dernières années du XVIII° siècle, « qui coïncidaient avec l’âge d’or du kyôka.) Tsutaya édita plusieurs recueils de kyôka dont la présente anthologie, illustrée par Hokusai. »

*

(à suivre … avec quelques exemples de ces kyôkas qui très souvent se réfèrent à, font allusion à, s’inspirent de, évoquent, parodient, pastichent d’autres poètes que ceux cités plus haut, tels Sôkan, Saigyô, Murasaki Shikibu, Sagami – une des 36 poètes immortels (sanjû Rokkasen)- etc. et aussi Bashô… (pourquoi pas !)… ou font intervenir polysémies, etc.)

*

Pour rebondir dans l’écho du puits, ajoutant à mes « Plus sur le kyôka », celui-ci, de Iso no Wakame
p.16 du Char des poèmes kyôka de la rivière Isuzu (: op.cit.) :

Todokanedo / tatsuru misao o / uki hito no / kumite shirekashi / horiido no mizu
Même hors d’atteinte / voici mon coeur fidèle ° / Et toi coeur léger / puise °° et sache / cette eau du puits profond

° (note 44) : « Misao o tateru » = jurer fidélité ou amour à quelqu’un. Le terme « sao » désigne la perche employée pour mesurer la distance, la hauteur et la profondeur. »

°° (note 45) : « Kumite » = considérer les désirs de quelqu’un. Ce kyôka parodie un poème de Saigyô in Sanka shû (Recueil de la hutte des montagnes) :

Kumite shiru / hito mo aranan / onozu kara / Horikane no i no / oko no kokoro o *
En puisant de l’eau / sans doute comprendra-t-il / par lui-même / la sincérité du coeur profond / comme l’eau au fond du puits **

** le puits de Horikane, situé dans la province de Musashi est un « uta-makura ».

* « o », n’est-ce la profondeur (de l’eau) du puits, cette unique allitération, cette unique voyelle la bouche en (« o » du) puits, du dernier vers (mais aussi progressivement tout au long du kyôka =
0 en première ligne
2 en deuxième
2 en troisième
3 en quatrième
7 en cinquième
?)

**

The name ‘kyôku’ was revisited after reading Jane Reichhold’s Writing and Enjoying Haiku (A Hands-on Guide) ; Kodansha International Ed., 2002, pages 154/155. Jane writes under the chapter : ‘KYÔKA (…) : Really Mad Poetry’ : ‘this is the nonserious side of tanka. (…) Actually, the term is also used for perfectly serious poems which have as subjects the writing of writers writing about the form. (…) In english we have not yet made a distinction between tanka on lighter subjects or tanka about tanka writing, but continue to use the same term for them all.’

Le terme « kyôku » fut revu après la lecture de Writing and Enjoying Haiku (A Hands-on Guide) ; Kodansha International Ed., 2002, pages 154/155 de Jane Reichhold, isbn 4-7700-2886-5.
Au chapitre ‘KYÔKA (…) : Really Mad Poetry’ (KYÖKA : une poésie vraiment folle) : C’est le côté non-sérieux du tanka.(…) En fait, on utilise le terme également pour des poèmes parfaitement sérieux, qui traitent de l’écriture d’écrivains écrivant sur la forme. (…) En anglais, nous n’avons pas encore fait la distinction entre le tanka sur des sujets plus légers ou le tanka à propos de l’écriture du tanka, mais continuons d’utiliser le même terme pour les deux occurrences. »

**

In L’Anthologie Poétique en Chine et au Japon, Extr.Orient-Extr.Occident, P.U.V. 2003 : l’article de Daniel Struve « Les recueils comiques de kyôka », p.139-163 :

« Très en vogue dans les milieux lettrés de la fin du XVI° siècle, le kyôka connaît alors un véritable âge d’or. (…) Matsunaga Teitoku (1571-1657), disciple de Hosokawa Yûsai et rpincipal promoteur du haikai est aussi considéré comme le fondateur du kyôka de l’époque d’Edo. » (p.140-141)

Le résumé de cet article dit : « Dans le Japon de l’époque d’Edo, l’introduction de l’imprimerie et le succès des genres poétiques comiques du haikai et du kyôka donnent lieu à la compilation de nombreux recueils. L’article retrace l’évolution des recueils du kyôka à partir du milieu du XVII° siècle jusqu’à l’apogée du genre à l’ère Tenmei (1781-1791), en relevant le statut ambigu que conserve tout au long de son histoire ce genre poétique. (…) »

**

Autre Kyôku (en référence à Bashô) :

Saute, grenouille,
que je puisse écrire
un haïku immortel !

d.p.(19/5/06)

**

Un kyôbun :

« Les grammaires du haïku » :

Le fait de ne pas inclure de verbe(s) dans le haïku permet de garder (ou de procurer) un certain flou (= le haïku en tant que  » devinette  » !), de laisser au lecteur le champ, l’ouverture d’imaginer ce qu’il veut à la place, de « terminer » le « poème » à sa manière, de résoudre l’énigme… ou pas !

Le fait de ne pas inclure de sujet, peut produire un effet quelque peu similaire ;

remplacer les pronom personnel + verbe par un participe présent,

ou la forme verbale conjuguée par un infinitif, également,
etc.

Au-dessus du carrefour
une feuille rousse

Empaqueté dans son duvet
Boulevard du vendredi soir

d.p.(19-21/1/08)

***

Épygramme – kyôka : « le naturel »

30 décembre 2009

°

A. un jour avoua
avoir beaucoup de mal
avec  » le naturel « .

J’en conclus qu’A.
a beaucoup de mal
avec le haïku.

°

d. (30/12/09)

Y. Hoffmann Japanese death poems (3)

9 octobre 2009

°

(p.78) de Fuse Yajiro
, un guerrier.

Son premier tanka de mort :

Naki tama no
kazu ni hairite
naku naka ni
uki akikaze no
mi ni zo shiminuru

Dans peu de temps
je serai un fantôme
Mais maintenant
comme ils mordent ma peau,
les vents de l’automne !

Son deuxième, un mois plus tard :

Kenkon no
soto yori kore o
unchi mireba
hiuchibako ni mo
taranu ametsushi

Vu de l’extérieur
la création,
la terre et le ciel
ne valent pas
une boîte d’allumettes.

°
page 79 :

 » Un poète de kyôka, avant de mourir, écrivit le fameux poème de mort d’un autre
poète,
avec cette préface :  » J’ai emprunté ce poème à quelqu’un d’autre « , et cette
postface :  »
ceci est le dernier plagiat que je ferai en ce monde.  »

(ctd…)

Poèmes de mort japonais Japanese death poems Y. Hoffman (2)

9 octobre 2009

dans : Japanese Death Poems
(Poèmes de mort japonais)
Written by Zen Monks and Haiku Poets on the Verge of Death
(écrits par des moines Zen et des Haijins sur le point de mourir)
compilé par Yoel Hoffmann
Tuttle Publ., 1986
isbn : 0-8048-3179-3

°
page 17 (Introduction : Poésie du Japon) :

 » à côté des deux formes du tanka et du haïku, deux styles
complémentaires se développèrent ultérieurement. Le KYOKA, « poème fou »,
est un tanka satirique qui ne se base généralement pas sur une image de
la nature ; cette forme fut très populaire dans la 2° moitié du XVIII°
siècle. Le SENRYU, nommé d’après son créateur, Karai Senryu (1718-
1790), est un haïku qui critique les failles humaines. Le SENRYU
s’écrit généralement dans la forme du haïku, mais peut être plus court,
en 2 lignes de sept syllabes chacune.  »

°

p.19/20 :

 » On peut comparer le poète de tanka (5/7/5//7/7) à une personne qui
tient deux miroirs dans ses mains :
l’un qui reflète une scène de la nature,
l’autre qui le reflète lui-même tenant le premier miroir.
Ainsi le tanka offre une vue sur la nature, mais aussi une vue sur
l’observateur de cette nature.
Le haïku n’est simplement pas un tanka condensé : les 14 syllabes
(//7/7) pour ainsi dire coupées du tanka afin de faire un haïku sont
en fait le miroir qui reflète le poète.
Le haïku a brisé le miroir auto-réfléchissant, ne laissant dans les
mains du poète que celui qui reflète la nature.  »
Y.Hoffmann

°

(p.53) de Ouchi Yoshitaka
(1507-1551), samouraï général et gouverneur de l’île de
Kyushu :

Utsu hito mo
utaruru hito mo
morotomo ni
nyo ro yaku nyo den
ô sa ni ze kan

Vainqueur
et vaincu
ne sont que gouttes de rosée,
qu’ éclairs d’orage –
ainsi devrions nous voir le monde.

°

(à suivre…)