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Bashô ++ : une étude comparative… 5/5

8 avril 2012

861)*

saru hiki no saru to yo o furu aki no tsuki

le maître du singe
le singe et sa vie frissonnent
sous la lune d’automne

(1684-1694. Automne. Ceci n’est pas un hokku mais un tsuke (« verset lié à un autre »). Le même verset est également utilisé dans le renga « Le Manteau de pluie du singe ».)

892)*
haremono ni yanagi no sawaru shinae kana

sur le bobo
le toucher du saule
se courbe

(Printemps 1694. Ceci est la version originelle du poème suivant, envoyé dans une lettre à Kyorai.)

893)* = 829)**
haremono ni sawaru yanagi no shinae kana

sur le bobo
le saule se penche
pour le toucher

(Printemps 1694. Là encore la question est de savoir si cela se produisit ainsi, ou si le verset use d’une comparaison.)

900)*
nehan e ya shiwade awasuru juzu no oto

le jour de la mort du Bouddha
des mains ridées rejoignent
le son des perles de prière

(Printemps 1694. La mort du Bouddha est célébrée le 15 février. Les deux dernières « lignes » ont différents sens possibles. Les mains de la personne sont jointes en prière, ou des mains ridées se joignent à d’autres mains ridées, ou, troisièmement, toutes le mains se joignent avec le claquement des perles de prière décomptées.)

(901)* = 917)**
kanbutsu ya shiwade awasuru juzu no oto

anniversaire de la naissance du Bouddha
des mains ridées s’unissent
au bruit des perles de prière

(Printemps 1694. On dit que Bashô écrivit cette deuxième version parce qu’il trouvait le jour de la mort du Bouddha trop triste. La signification littérale de kanbutsu est kam (« verser ») et butsu (« Bouddha »). Le huit avril, il était coutumier de verser un thé fait de fleurs d’hortensia sur les statues du Bouddha pour célébrer son anniversaire.)

(926)* = 842)**
mugi no ho o tayori ni tsukamu wakare kana

épis d’orge
dépendant de leur prise
lors des adieux

(Été 1694. Cette version du poème apparut dans trois publications.)

927)*
mugi no ho o chikara ni tsukamu wakare kana

épis d’orge
cherchant du soutien
lors des adieux

(Été 1694. L’idée de ces deux poèmes est la même, mais on peut voir que la révision donne un sens légèrement meilleur. Bashô était déjà passablement malade et affaibli.)

935)*
suzushisa no sashizu ni miyuru sumai kana

la fraîcheur
apparaît dans les plans
de cette maison

(Été 1694. Cette version du poème fut manuscrite.)

936)* = 852)**
(Yasui projetait de se construire une maison pour sa retraite.)

suzushisa o Hida no takumi ga sashizu kana

pour la fraîcheur
ce charpentier de Hida a
les plans de la maison

(Été 1694. La région de Hida, au nord de la Préfecture de Gifu, était renommée pour ses charpentiers. Ceci est la version publiée du poème.)

952)*
kiyotaki ya nami ni chiri naki natsu no tsuki

cascade claire
une lune d’été sur les vagues
mais pas de poussière

(Été 1694. Bashô se sert encore d’un jeu de mots sur le mot kiyotaki (« cascade claire ») . Ce verset s’articule sur l’idée que le clair de lune tombe en cascade comme l’eau dans le courant, et que tous deux échappent aux grains de poussière.)

953)*
Ôi-gawa nami ni chiri naki natsu no tsuki

La rivière Ôi
pas de poussière sur les vagues
seule une lune d’été

(Été 1694. Un autre essai avec le même poème. Selon Kenkichi Yamamoto, la raison pour laquelle cette version emploie la rivière Ôi au lieu de la rivière Kiyo (« claire ») est d’éviter le double emploi de « claire » et de « nul grain de poussière ».)

1012)* = 858)**
kiyotaki ya nami ni chiri komu ao matsuba

cascade claire
répandues sur les vagues
des aiguilles de pin vertes

(Automne 1694. Bashô considéra ceci comme une révision du verset composé en juin de cette même année ( : cf : 952)*) parce que ça le gênait que les deux « lignes » « claire cascade » et «pas de poussière sur les vagues » forment une redite. Ce verset fut gravé sur une pierre, qui fut, le 12 juillet 1971, posée à la confluence des rivières Ôi et Kiyotaki.)

973)*
tanabata ya aki o sadamuru hajime no yo

Festival des Étoiles
L’automne s’est installé
la première des nuits

(Été 1694)

974)* = 876)**
tanabata ya aki o sadamuru yo no hajime

Fête des Étoiles
l’automne s’est installé
la première nuit

(Été 1694. La Fête des Étoiles, qui a lieu le 7ème jour du 7ème mois, était un pique-nique de soirée très populaire. On ne pouvait voir les étoiles que si l’air frais et clair de l’automne arrivait un peu à l’avance.)

984)*
kazairo ya shidoro ni ue shi niwa no hagi

la couleur du vent
planté sans art dans un jardin
lespédèze

(Automne 1691. Il existe trois versions de cette strophe. Celle-ci fut publiée dans le livre de Ensui : Sanzôshi.)

985)*
kazairo ya shidoro ni ue shi niwa no aki

la couleur du vent
planté sans art
dans un jardin d’automne

(Automne 1694. Ici le dernier mot de « lespédèze » est changé en « automne ».

986)*
kazairo ya shidoro ni ue shi niwa no ogi

la couleur du vent
planté sans art
dans un jardin de roseaux

(Automne 1694. C’est la troisième version de la strophe. Le dernier mot seul est changé. Le processus de révision montre combien il importait à Bashô de trouver la meilleure image.)

1005)*
hito goe ya kono michi kaeru aki no kure

voix humaines
revenant sur cette route
le départ de l’automne

(Automne 1694. L’expression aki no kure peut se traduire par « un soir en automne » ou « la fin de l’automne » ou par « passage de l’automne » ou par « départ ». Bashô joue avec l’idée de traiter de la même manière des idées abstraites et la réalité.)

°°°

Fin de l’étude comparative entre l’ « intégrale » des haïkaï de Bashô par Jane Reichhold dans Bashô, The Complete Haiku (Kodansha Int., 2008) et par M. Kemmoku et D. Chipot, dans Bashô, Seigneur ermite (La Table ronde, 2012).

°

* numéros des haikai dans l’ordre du Basho The Complete Haiku de J. Reichhold.

** n°s des haïkus dans l’ordre de l’ouvrage de Kemmoku et Chipot : Bashô, Seigneur ermite, La Table ronde, 2012.

°°°

12 Plagiats de CHRISTINE SAÏTO par Daniel Py

4 février 2012

12 Plagiats de CHRISTINE SAÏTO,
extraits de Visions fugitives,
éd. de l’Amandier, 2002,
par Daniel Py :

°

les fleurs tourbillonnent –
la mort peut-elle danser ?

(cf. p. 7)

°

jaune sur jaune :
où le papillon ?
où la fleur ?

(cf. p. 15)

°

lune et nuages
jouent à cache-cache
Nouvel An

(cf. p.19)

°

petit chapeau de soleil jaune
moi aussi je mange du riz

(cf. p.27)

°

la foule sort du musée
ombre et silence
y entrent

(cf. p. 29)

°

le chant des oiseaux épouse le son des cloches
Dimanche au village

(cf. p. 40)

°

à l’orée de l’invisible
l’objet
sur sa tranche de silence

(cf. p. 41)

°

blancheur du cyclamen
le présent ? l’ombre
entre les pétales

(cf. p. 46)

°

une cloche sonne
un clochard s’éveille
se rendort

(cf. p. 50)

°

le grand nuage blanc glisse dans le bleu
les fleurs des champs soupirent d’aise

(cf. p. 55)

°

un crépuscule gris
glisse sur les murs gris,
une femme en noir attend

(cf. p. 56)

°

l’arbre condamné –
dans sa chute
arrache une étoile

(cf. p. 65)

°

: d.py, 4/2/12.