Sôkan (1464-1552)
Un des plus grands maîtres du haïkaï, élève de Ikkyû (1394-1481), et moine.
Posant ses mains sur le sol
la grenouille respectueusement
récite son poème
(Un verset d’Issa s’en rapproche :)
La grenouille
assise, chante
comme Saigyô
(Saigyô (1118-1190) devint moine à vingt-trois ans et voyagea à travers tout le pays en composant des waka).
Sôkan fait partie de ceux qui établirent le lien fondamental entre haïkaï et humour. Il ne perdit jamais son sens de l’humour, jusqu’à sa fin. Son poème de mort est un waka :
Si les gens demandent
où est parti Sôkan,
répondez-leur :
« Il est parti pour affaires
dans le monde d’après »
(Sôkan fait constamment des jeux de mots, et ici le jeu de mots porte sur « yo », le monde, et « yô », les affaires.)
On dit qu’il écrivit dans son journal :
Grande classe : les visiteurs qui partent tout de suite
Classe moyenne : ceux qui s’en retournent le jour-même, et
ceux qui restent : les plus vils d’entre tous. »
Cent-cinquante ans plus tard, Etsujin (1656-1702), un des « Dix Sages » de Bashô, écrivit :
Même si l’on m’appelle
le plus vil des visiteurs,
ce logis fleuri!
, signifiant que même ainsi il chantera les fleurs de cerisiers :
gege no ge no kyaku to iwaren hana yo yado
Ce « ge-ge », Issa l’utilisera plus excessivement encore :
Pauvre, pauvre, oui, pauvre,
la plus pauvre des provinces, et pourtant
sentez cette fraîcheur!
en répétant sept fois ce son « ge » :
gege mo gege gege no gekoku no suzushisa yo
comme pour enfoncer les clous du cercueil de sa pauvreté : pauvre homme dans un pauvre village d’une pauvre province. Mais du fond de cette pauvreté il s’écrie : « Comme sont plaisants les courants frais qui viennent jusqu’à nous! »
S’ils passaient sans bruit
les hérons ne seraient
qu’une ligne de neige
à travers le ciel
–
Même au moment
où mon père mourait,
je continuais de péter.
°°°
(à partir de « Haiku » de R.-H. Blyth.)
(trad. fr. : D. Py)
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