Pour contrer Barthes (et autres Sieffert…) ?

Retrouvé, de Jean Sarocchi, dans la Revue d’études Japonaises « Daruma » n°1,
du printemps 1997, au sein de son article « traduire le haïku », pp.17-80 :

°

« les 17 syllabes du haiku traditionnel, réparties 5/7/5, sont souvent rendues,
en français ou en anglais, par un compte à peu près égal de syllabes, réparties
en trois vers. Il suffit de lire des haiku dans leur graphie japonaise pour
s’apercevoir à l’oeil nu (c’est-à-dire non armé d’intellection) que les trois
vers n’y sont pas, ou rarement. Or le spécialiste patenté, René Sieffert,
s’applique, tel un scrupuleux écolier, à ce comptage, sans éviter pour autant le
mécompte. (…) En revanche, fasciné par Barthes, dont l' »Empire des signes »
figure, dans la décennie 1970-80, une sorte de livre canonique, [Maurice Coyaud]
ne s’interroge nullement sur la sorte d’intimité que Barthes entretient avec le
haiku. Et si je fronde les spécialistes parce qu’ils échouent à traduire, il me
faut avec eux m’étonner que les traductions soient reçues telles quelles, sans
soupçon, par des écrivains aussi subtils que Barthes. Mais Barthes n’est pas un
poète, le signe a trop d’empire sur lui. »
(p.19)

°
(p.29 :)

« si Roland Barthes se leurre dans l' »Empire des signes » quand il espère
s’initier là-bas à une « systématique de l’inconcevable », ils ([Merleau-Ponty et
Barthes] nous charment, l’un et l’autre, par ces « abstracts » de philosophe ou de
sémiologue, qui trahissent leur ancrage d' »Occidentaux ».

°

(p.31)
« Je n’ai pas lu Bashô, Barthes non plus ne l’a pas lu, ni même Bonnefoy ou
Jaccottet : font comme si ; leur contradiction, c’est d’avouer qu’ils n’y
entendent rien, puis de commenter ou de célébrer comme s’ils avaient entendu  »

°

(p.42)
« On peut s’étonner que Barthes, si fasciné par les signes, et convaincu qu’un
signe ne s’ouvre jamais que sur le visage d’un autre signe, n’envisage pas,
citant des haiku, les signes japonais, chaque fois, correspondant, et leur
calque phonique, pire, qu’il ne s’interroge même pas sur la qualité de ces
signes traduits dont il se suffit comme s’ils appartenaient à « l’empire des
signes », au même titre que la tempura ou le sashimi. A fortiori s’étonnera-t-on
que Bonnefoy, poète, lui, et de surcroît capable sur l’écriture-peinture du
haiku d’une pénétrante réflexion, se hasarde à interpréter des poèmes dont il ne
vérifie pas le graphisme et la sémantique, s’exposant ainsi à des bévues. »

°

(p.51)
 » L’on prétend que le haïku suspend le sens, ne veut rien dire (Barthes), donc
le commentaire serait impossible. Faux ! Le haiku veut toujours dire quelque
chose. L’idée que ça ne veut rien dire est une coquetterie de sectaires
précieux. Buson écrit : « c’est le soir, l’automne je pense seulement à mes
parents ». Si le commentaire ici n’est pas de mise, ce n’est pas que le sens soit
manquant, c’est qu’il est transparent. Mais nombre de haiku tels quels
(traduits) décevants pour le lecteur étranger gagnent évidemment à être
commentés. »

°

(p.58)
« Question de mouche, je ne sens aucune différence entre Issa (« dans la véranda
la mouche frotte ses mains suppliantes on la tue ») et moi. Tout le discours de
Barthes sur la différence japonaise s’effondre : capucin de cartes truquées. »

°
Bien à vous,
D.

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